SOCIÉTÉ - ACTIONS - 11.03.2020

Jusqu’où peut-il remonter avec la disposition anti-abus ?

L’associé d’une SCRL agréée s’était retiré et avait perçu en 2012 une part de retrait, que la loi exonère de précompte mobilier (Pr M). Le fisc y a toutefois vu un abus fiscal et a imposé la part de retrait comme un revenu professionnel. Et la justice, qu’en a-t-elle dit ?

Un pharmacien a une SPRL. De 1979 à 1999, il avait acheté en son nom propre des actions d’un grossiste coopératif de pharmaciens indépendants. En 2012, il avait démissionné de cette SCRL et perçu une part de retrait de ± 285 000 €, exonérée de Pr M et d’impôt des personnes physiques, vu que la SCRL était agréée (art. 264, al. 1, 2°ter CIR 92) .

Position de l’Administration

Le fisc estime que le pharmacien a commis un abus fiscal. En toute logique coopérative et économique, ce n’est pas lui, mais sa SPRL qui aurait dû devenir coopérateur. En fait, la part de retrait aurait dû revenir à cette SPRL. Par un montage d’entrée dans l’actionnariat et de retrait, il aurait évité l’application de la disposition légale sur les rémunérations de dirigeants en violation de l’intention du législateur, laquelle était, selon le fisc, de rendre tous les avantages recueillis par un dirigeant imposables à titre de revenus professionnels.

Position de la justice

La Cour d’appel de Gand a donné tort au fisc. Celui-ci a appliqué la nouvelle disposition anti-abus (DAA), mais celle-ci n’a été applicable qu’à partir de l’exercice d’imposition (ex. imp.) 2013, ou à partir de l’ex. imp. 2012 pour les actes juridiques ou ensembles d’actes juridiques qui ont été posés durant un exercice comptable clôturé au plus tôt le 06.04.2012. Pour un ensemble d’actes juridiques, il faut, selon la cour d’appel, que tous aient été posés après la date d’entrée en vigueur de la nouvelle DAA. Ce n’était pas le cas ici : le pharmacien avait acquis les actions de la SCRL de 1979 à 1999, donc de nombreuses années auparavant.

Commentaire

L’ancienne et la nouvelle DAA. En 2012, le gouvernement Di Rupo avait réécrit la disposition générale anti-abus (art. 344, §1 CIR 92) , destinée à combattre les montages qui évitent l’impôt en respectant la lettre de la loi. Il l’avait fait, car le fisc ne pouvait appliquer qu’exceptionnellement la disposition qui existait à l’époque.

Un ensemble d’actes juridiques. La nouvelle DAA peut s’appliquer à l’évitement de l’impôt obtenu au moyen d’un acte juridique ou d’un ensemble d’actes juridiques. Selon une circulaire de 2012, il suffit, dans le deuxième cas, que le dernier acte juridique de l’ensemble ait été posé après la date d’entrée en vigeuur de la loi (circ. Ci. RH. 81/616.207 du 04.05.2012) . La plupart des fiscalistes contestent toutefois cette position et cette cour d’appel elle aussi, donc.

Important aussi pour les holdings. Parfois, le fisc applique aussi la nouvelle DAA aux «plus-values internes», ces plus-values réalisées lors de l’apport ou de la vente d’actions d’une société opérationnelle à une holding. Il requalifie alors la réduction de capital ou le paiement d’un prix par la holding à la personne qui apporté ou vendu les actions en un dividende de la société opérationnelle. Cet arrêt vous permet le cas échéant de vous défendre face à une telle position si l’apport ou la vente date d’avant l’ex. imp. 2013 ou pour des exercices comptables clôturés avant le 06.04.2012.

Vous trouvez l’arrêt de la Cour d’appel de Gand du 03.12.2019 (décision originale en néerlandais) sur http://astucesetconseils-impots.be/annexes  - code IM 26.10.06.

Le fisc peut appliquer la «nouvelle disposition anti-abus» à un «ensemble d’actes juridiques», p.ex. l’apport d’actions à une holding et une réduction de capital ultérieure. Selon cette cour d’appel, tous les actes juridiques, et pas seulement un seul, doivent avoir été posés après l’entrée en vigueur de la nouvelle disposition, donc après l’ex. imp. 2013 ou éventuellement 2012.


Pour aller plus loin


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