INTÉRÊTS - 07.04.2020

30 % de l’EBITDA : répartition du montant de minimis de 3 000 000 € entre les sociétés d’un même groupe

À partir de l’exercice d’imposition 2020, la déduction des surcoûts d’emprunt nets est limitée en fonction de l’EBITDA de la société, il est vrai avec un minimum de 3 000 000 €. Un AR récent (AR 20.12.2019) précise à présent comment ces 3 000 000 € doivent être répartis entre les contribuables au sein d’un groupe de sociétés.

Nouvelle limitation de la déduction

Surcoûts d’emprunt nets

Dans le cadre de la réforme de l’impôt des sociétés – et à la suite de la transposition obligatoire de la directive européenne anti-évasion fiscale (Anti-Tax Avoidance Directive – ATAD) –, les règles en matière de déduction des charges d’intérêts ont été partiellement revues. Plus concrètement, la déduction des surcoûts d’emprunt est limitée en fonction de l’EBITDA de la société à partir de l’exercice d’imposition 2020.

La nouvelle règle vise les surcoûts d’emprunt nets de la société concernée. Ces surcoûts nets sont définis comme étant la différence positive entre (i) le total des intérêts (et coûts similaires) qui sont considérés comme des frais professionnels de la période imposable et (ii) le total des intérêts (et produits similaires) qui sont compris dans les bénéfices de cette même période imposable.

Il est à noter à cet égard que le législateur ne vise pas exclusivement les paiements entre sociétés d’un même groupe. Les paiements d’intérêts entre tiers entrent également dans le champ d’application de la méthode de calcul.

30 % de l’EBITDA fiscal ou montant «de minimis»

La déductibilité de ces surcoûts d’emprunt est ensuite limitée au montant le plus élevé des deux montants suivants : 3 000 000 € (limite absolue, la «règle de minimis») ou 30 % de l’EBITDA fiscal du contribuable (limite relative). Seuls les contribuables dans le chef desquels les surcoûts d’emprunt sont supérieurs à 3 000 000 € seront dès lors impactés par cette nouvelle mesure. Pour eux, le calcul de l’EBITDA fiscal pertinent revêtira une importance cruciale.

La réglementation comprend par ailleurs une série de points techniques. Elle n’est ainsi, entre autres, pas applicable aux entités isolées et à certaines sociétés actives dans le secteur financier, et une approche spécifique a été prévue pour les sociétés actives dans le partenariat public-privé. Des règles spécifiques sont également prévues pour les sociétés de groupes.

Sociétés d’un même groupe

Règles de consolidation spécifiques

Les sociétés qui font partie d’un groupe sont soumises à des règles spécifiques et ce, à divers égards. Tout d’abord, la limitation de la déduction est appliquée pour ces sociétés sur la base de règles de consolidation spécifiques. C’est ainsi que les coûts qui sont dus à et les produits qui sont dus par une société résidente liée (ou un établissement belge) ne sont pas pris en considération dans le calcul de l’EBITDA (consolidé). Cette règle ne s’applique que si (i) l’entité a fait partie du groupe pendant toute la période imposable et (ii) elle n’est pas exclue de l’application du régime (p.ex. parce qu’il s’agit d’une entité exclue, active dans le secteur financier).

Répartition du montant de minimis

Le calcul du montant limite est par ailleurs adapté : le montant de minimis de 3 000 000 € est en effet réparti proportionnellement entre les sociétés liées (et établissements belges). Cette répartition a été définie concrètement dans l’intervalle (art. 73, 4/12 AR/CIR 92) .

La méthode de calcul qui figure dans l’AR permet à chacun des contribuables liés de pouvoir encore prétendre au panier de 30 % de l’EBITDA fiscal propre déterminé au niveau individuel. Ensuite, la différence entre (i) les propres surcoûts d’emprunt nets et (ii) cette limite relative de 30 % de l’EBITDA est calculée pour chaque contribuable lié. Les différences positives constituent des «déficits» de marge dans le panier individuel.

Enfin, l’éventuel solde non utilisé du «panier du groupe» (à savoir 3 000 000 €, diminués de la somme de la limite des 30 % de l’EBITDA de tous les contribuables concernés) est réparti en fonction des déficits des contribuables concernés, tels qu’ils résultent de l’étape précédente de ce calcul.

Le panier de chaque contribuable a donc deux composantes : une première, calculée sur la base de l’EBITDA propre, et une seconde, calculée sur la base des propres déficits (en proportion des déficits des contribuables liés). Si la somme des limites relatives (30 % de l’EBITDA) excède cependant 3 000 000 €, la seconde composante s’élèvera à 0 €.

Exemple

Les sociétés A, B et C sont des sociétés liées. Leurs surcoûts d’emprunt nets s’élèvent respectivement à 500 000 €, 1 500 000 € et 3 000 000 €. La limite de 30 % de l’EBITDA de ces sociétés s’élève respectivement à 200 000 €, 1 300 000 € et 1 000 000 €. Les déficits s’élèvent par conséquent à 300 000 € pour la société A, 200 000 € pour la société B et 2 000 000 € pour la société C.

La répartition des 3 000 000 € au niveau du groupe s’effectue dès lors comme suit :

1e étape : attribution de la limitation de 30 % individuelle et détermination des déficits individuels et du solde au niveau du groupe :

  • Société A : limite de 200 000 € (limite relative) entièrement utilisée ; déficit de 300 000 € ;
  • Société B : limite de 1 300 000 € (limite relative) entièrement utilisée ; déficit de 200 000 € ;
  • Société C : limite de 1 000 000 € (limite relative) entièrement utilisée ; déficit de 2 000 000 €.

Solde dans le panier du groupe de 3 000 000 € = 3 000 000 € - (0,2 + 1,3 + 1 million €) = 500 000 €. Déficit au niveau du groupe : 2 500 000 € (0,3 + 0,2 + 2 millions €).

2e étape. Répartition du solde de 500 000 € dans le panier du groupe de 3 000 000 €, en fonction des déficits :

  • Société A : attribution de 500 000 € × (0,3/2,5) ou 60 000 € ;
  • Société B : attribution de 500 000 € × (0,2/2,5) ou 40 000 € ;
  • Société C : attribution de 500 000 € × (2/2,5) ou 400 000 €.

En termes consolidés, cela signifie que la société A peut déduire un montant de 260 000 €, la société B, un montant de 1 340 000 € et la société C, un montant de 1 400 000 €. Les sociétés atteignent ainsi ensemble la limite absolue de 3 000 000 €.

Transfert de la capacité de déduction non utilisée

Pour être complet, signalons qu’un contribuable qui fait partie d’un groupe peut conclure une convention de déduction d’intérêts avec un autre contribuable qui fait partie du même groupe de sociétés (art. 198/1, §4 CIR 92) afin de pouvoir ainsi affecter de manière optimale la capacité de déduction non utilisée au sein des sociétés du groupe. En fonction de ce qui a été convenu, le montant limite du contribuable est augmenté ou diminué du montant limite transféré déterminé dans la convention. Une convention de déduction d’intérêts de ce type offre donc à une société la possibilité de transférer sa capacité de déduction non utilisée à une autre société du groupe.

Un AR récent précise comment vous devez répartir le montant de minimis de 3 000 000 € au sein d’un groupe de sociétés. Vous pouvez par ailleurs aussi conclure au sein d’un groupe de sociétés une convention de déduction d’intérêts afin d’affecter de manière optimale la capacité de déduction non utilisée.

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