CONTRÔLE DES E-MAILS - 28.05.2020

Une autorisation pour consulter les e-mails professionnels ?

En consultant la boîte mail d’un travailleur, vous constatez des choses qui vous amènent à licencier celui-ci pour motif grave. Vous n’avez certes pas demandé son autorisation, mais il s’agit seulement d’e-mails purement professionnels. Cette preuve a-t-elle été obtenue régulièrement ? Réponse de la Cour de cassation.

Consultation d’une boîte mail

L’ouverture de la boîte mail d’un travailleur et la consultation de ses e-mails est depuis toujours un sujet complexe. Le point de départ est que la prise de connaissance d’informations destinées à des tiers, sans avoir obtenu leur autorisation, est non seulement prohibée, mais aussi punissable (art. 124 de la loi relative aux communications électroniques) . Une exception est toutefois prévue lorsque la loi permet l’accomplissement de ces actes (art. 125 LCE) . La Cour de cassation s’est aussi prononcée sur cette problématique...

Que s’est-il passé ?

Dans le cadre d’une enquête, un employeur constata qu’un travailleur avait fait des déclarations mensongères, dissimul é des informations et refusé de coopérer. Il le licencia dès lors pour motif grave. Les faits étaient établis au regard d’e-mails que le travailleur avait échangés avec une relation professionnelle et auxquels l’employeur avait eu accès. Le travailleur contesta toutefois son licenciement, arguant que cette preuve avait été obtenue illégalement (sans son autorisation).

Qu’a dit le juge ?

La cour d’appel considéra qu’aucune autorisation n’était requise pour consulter la correspondance électronique parce qu’il s’agissait notamment de courriels purement professionnels sans aucun lien avec la vie privée. L’article 124 LCE ne s’appliquait donc pas d’après la cour (Bruxelles, 17.01.2017) .

La Cour de cassation a toutefois cassé cet arrêt. En affirmant qu’il importait peu que l’intéressé ait ou non donné son autorisation parce qu’il s’agissait d’e-mails sans lien avec la vie privée, la Cour d’appel a en effet violé l’article 124 LCE d’après notre juridiction suprême.

Que devez-vous en retenir ?

On peut déduire de cet arrêt de cassation que l’article 124 LCE ne fait pas de distinction entre e-mails privés et professionnels. En ce sens, vous ne pouvez donc pas dire que sur base de cet article de loi, aucune autorisation du travailleur ne serait nécessaire pour consulter ses e-mails professionnels. Il ne faut toutefois pas non plus faire dire à cet arrêt plus que ce qu’il ne dit réellement. Ainsi, il y a encore l’article 125 LCE qui dispose que «la loi» peut justifier une consultation sans autorisation. En matière de personnel, il s’agit de la CCT n° 81 qui vous autorise, à des fins déterminées ( «la protection des intérêts économiques, commerciaux et financiers» ), à accéder aux e-mails de nature professionnelle.

Conseil.  Si vous avez imposé dans un règlement de libeller comme tels les e-mails privés, vous pouvez consulter les autres sans devoir demander l’autorisation expresse du travailleur. Si vous disposez d’un tel règlement, vous avez donc quelque chose auquel vous raccrocher, ce qui ne vous empêche pas de jouer la sécurité en demandant toujours l’autorisation expresse de l’intéressé. Cela reste en effet une question sensible...

Cour de cassation, 20.05.2019. Décision défavorable à l’employeur.

Chaque fois que vous voulez consulter la boîte mail d’un travailleur, le plus sûr reste de lui demander son autorisation préalable. Si vous disposez toutefois d’un règlement qui impose aux travailleurs de libeller comme tels leurs (éventuels) e-mails privés, vous pourrez vous y raccrocher pour consulter leurs e-mails de nature professionnelle.

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