PLANIFICATION SUCCESSORALE - 09.07.2020

Donner un immeuble à vos enfants : à quoi faire attention ?

En 2015, les droits sur les donations immobilières ont été fortement réduits et simplifiés en Région flamande. Les deux autres Régions ont suivi peu de temps après. La planification successorale par le biais de donations est, dès lors, devenue beaucoup plus attrayante. Ces opérations ont toutefois aussi des conséquences autres que fiscales. Voici quelques points sur lesquels se pencher.

Apport et/ou réduction

Chaque enfant doit recevoir une part égale de l’héritage, en tenant compte de ce qu’il a déjà reçu. Cette compensation, appelée «rapport», consiste, pour chaque héritier, à «rapporter» les donations qu’il a reçues précédemment, lors du calcul de la succession (art. 843 C. civ.) . L’égalité entre les enfants doit être réalisée en valeur (art. 822, §1, al. 2 C. civ.) . Par conséquent, l’égalité qui a été rompue par des dons inégaux ne doit être rétablie qu’en valeur, c’est-à-dire en argent.

Les dons dépassant la part disponible doivent donc être réduits et puisque la réserve doit être respectée en valeur, la demande de réduction est une créance valable (art. 920, §2 C. civ.) . Le donataire doit, par conséquent, dédommager financièrement l’héritier réservataire pour la partie du don qui dépasse la part disponible (art. 924, §1 C. civ.) .

Vous pouvez donc sans problème transférer un ou plusieurs biens immobiliers à l’un de vos enfants par le biais d’une donation. Cet enfant aura alors la certitude de pouvoir le conserver. Toutefois, il devra indemniser financièrement ses frères et sœurs si l’égalité a été rompue ou si la part disponible a été dépassée.

Réserve d’usufruit

Le don ne doit pas obligatoirement être fait en pleine propriété. Si le donateur souhaite faire don de certains biens tout en en conservant les revenus, il peut faire une donation avec réserve d’usufruit. Ainsi, seule la nue-propriété fait l’objet de la donation, l’usufruit étant conservé par le donateur. Cela permet à ce dernier de continuer à vivre dans la maison ou à percevoir les revenus locatifs.

Cependant, dans une telle configuration, si l’usufruitier-donateur souhaite vendre le bien pour investir dans un autre bien, il ne peut pas obliger le nu-propriétaire à vendre la nue-propriété. Même si le nu-propriétaire accepte de vendre, l’usufruitier-donateur ne pourra pas décider seul de la manière dont le prix de vente sera réinvesti. Il aura alors besoin de l’accord du nu-propriétaire pour prendre une décision.

On peut toutefois inclure, dans l’acte de donation, un certain nombre de clauses donnant plus de contrôle et de pouvoir de décision à l’usufruitier- donateur, mais il ne faut pas oublier que ces clauses ne peuvent pas aller à l’encontre du principe de l’irrévocabilité de la donation. Le donateur ne peut donc pas se réserver le droit de disposer des objets donnés.

Obligation de suite et clause de réinvestissement

Pour commencer, l’acte de donation peut inclure une clause obligeant le donataire à vendre la nue-propriété si le donateur-usufruitier décide de vendre le bien.

Ensuite, l’insertion d’une clause de réinvestissement dans le même acte permettra au donateur, après la vente d’un bien ayant préalablement fait l’objet d’une donation avec réserve d’usufruit, de réinvestir le prix de vente obtenu lors de la vente du bien dans un autre bien de son choix (en conservant le même rapport juridique entre usufruitier et nu-propriétaire).

Mandat de gestion notarié

Lors de la passation de l’acte de donation, le donataire peut également établir une procuration notariée au profit du donateur, afin qu’il soit habilité à effectuer tous les actes de gestion. Bien que cela exclue, en principe, les actes de disposition, il est néanmoins possible que, dans le cadre d’un mandat de gestion (étendu), le pouvoir d’accomplir des actes de disposition soit également attribué au donateur-mandataire. Toutefois, dans l’accomplissement de ces actes, ce dernier devra toujours agir en qualité de mandataire, et donc au nom et pour le compte du mandant.

En sa qualité de mandataire, le donateur sera alors tenu de rendre compte au donataire-mandant (art. 1993 C. civ.) . En effet, le donateur exerce ce droit en sa qualité de mandataire et non de propriétaire. Un tel mandat n’est donc pas contraire au principe de l’irrévocabilité des donations.

Le mandat de gestion est en principe révocable ad nutum, mais ce principe ne s’applique qu’en l’absence de convention contraire (art. 2004 C. civ.) . Il est donc également possible de lui conférer un caractère irrévocable.

Clause de retour conventionnelle

En prévoyant une clause de retour conventionnelle, le donateur stipule en fait que la donation sera annulée si le donataire venait à décéder avant lui (art. 951, §1 C. civ.) . La restitution ne peut alors être prévue qu’en faveur du donateur (art. 951, al. 2 C. civ.) . Dans le cas d’un don effectué par plusieurs donateurs, comme par exemple deux personnes mariées, la restitution prévue sera effectuée au profit de chacun d’entre eux, mais uniquement dans les limites de leurs parts respectives dans la donation.

La clause de retour conventionnelle assortit en fait la donation d’une condition résolutoire, en cas de décès du donataire avant le donateur. Si cette condition se réalise, la donation est dissoute de plein droit et avec effet rétroactif (art. 952 C. civ.) . En raison de l’effet rétroactif de la condition résolutoire, le bien donné est alors réputé n’avoir jamais appartenu au donataire, ce qui implique donc aussi que les héritiers et les ayants droit du donataire n’ont aucun droit à faire valoir sur les biens donnés.

Objet du retour

Si le bien donné est, en tant que tel, présent en nature dans le patrimoine du donataire au moment de son décès, il ne fait pas partie des actifs de la succession du donataire. Il retourne alors – en exonération d’impôt – dans le patrimoine du donateur (déc. fédérale 21.02.2007, RJ S 15/37-01 ; position Vlabel n° 16021, 22.03.2016) , même si sa valeur a augmenté entre-temps.

Il est également possible que le donataire ait vendu l’objet de la donation. Dans ce cas, le bien donné n’est plus présent en nature dans le patrimoine du donataire. Il y a été remplacé par une somme d’argent ou un autre bien acheté avec le prix obtenu lors de la vente. Cependant, si, dans l’acte de donation notarié, on a lié une clause de subrogation réelle à la clause de retour conventionnelle, le bien obtenu en remplacement de l’objet de la donation sera traité comme le bien donné à l’origine. Il sera donc considéré comme ne faisant pas partie du patrimoine du donataire et il retournera dans celui du donateur, même si, dans l’intervalle, sa valeur a augmenté au-delà de celle du bien donné à l’origine. Ce retour a alors également lieu en exonération d’impôt (position Vlabel n° 16030, 04.04.2016) .

Si vous faites don d’un bien en prévoyant une clause de retour conventionnelle sans subrogation réelle, aucune restitution du bien remplacé, ni civile ni fiscale, ne sera possible en cas d’aliénation ultérieure. Il ne sera pas non plus possible de déposer une créance mobilière de remplacement, puisque la donation d’origine ne portait pas sur des biens fongibles.

Retour optionnel

Selon l’administration fiscale flamande (Vlabel), si le donateur dispose du choix d’accepter ou non le retour, celui-ci équivaut en fait à une cession à titre onéreux. Par conséquent, si l’objet de la donation était un bien immobilier, les droits de vente (de 10 % en Flandre) sont dus. Il peut donc être intéressant de laisser au donateur le choix entre le retour en nature (donc avec paiement des droits de vente) ou le retour de l’équivalent en argent (qui aurait alors lieu en exonération d’impôt).

CONSEILS

  • Si vous faites un don avec réserve d’usufruit, vous bénéficiez déjà, en tant que donateur, d’une certaine protection et d’un certain contrôle. Si vous souhaitez également disposer d’un certain droit de décision, prévoyez des clauses spéciales dans l’acte de donation. Le mandat de gestion notarié vous donne, en tant que donateur, le pouvoir d’effectuer des actes de gestion, voire de disposition.
  • Liez une clause de subrogation réelle à la clause de retour conventionnelle. Ainsi, en cas de vente, le bien de remplacement retournera dans votre patrimoine si le donataire décède avant vous.
  • Si vous incluez une obligation de suivi et une clause de réinvestissement, vous pouvez décider de la vente du bien donné et du réinvestissement du produit, toujours dans un rapport nue-propriété/usufruit.

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