CRISE DU CORONAVIRUS - 09.07.2020

Donner un peu d’air à votre société, financièrement, en diminuant votre salaire ?

Si votre entreprise fait face à des problèmes de liquidités en raison de la crise du coronavirus, alors que vous disposez encore de réserves sur le plan privé, vous pouvez l’aider financièrement en réduisant temporairement votre salaire. Quelle est alors la meilleure façon de procéder et quelles sont les conséquences fiscales pour votre entreprise et pour vous, sur le plan privé ?

Comment procéder ?

Deux possibilités

Soit vous vous accordez un salaire inférieur, soit vous ne vous versez pas, pour l’instant, une partie de votre salaire. Dans le second cas, au lieu de le transférer sur votre compte bancaire privé, votre société inscrira la partie de votre salaire net que vous ne retirez pas pour le moment au crédit de votre compte courant. Vous pourrez dès lors vous faire verser ce montant plus tard, quand votre société en aura les moyens. Dans les deux cas, votre société conserve plus de liquidités.

Que faut-il faire ?

Normalement, mieux vaut vous verser un salaire inférieur plutôt que de ne pas vous le verser en totalité. En effet, les salaires sont imposables pour l’année au cours de laquelle ils sont versés ou attribués (art. 204, 3°, b AR/CIR 92) . Un salaire attribué en 2020 sera donc également imposable pour 2020, même s’il n’a pas été effectivement versé. Vous devrez donc l’inclure en totalité dans votre déclaration d’impôt pour 2020, l’année prochaine. Votre société doit aussi retenir le précompte professionnel (art. 273, 1° CIR 92) sur les salaires qui ont été attribués mais qui n’ont pas encore été payés. Vous paierez donc des impôts sur quelque chose que vous n’avez pas encore reçu. Si votre société devait se retrouver dans une mauvaise passe avant que vous ne puissiez verser votre salaire, vous perdriez cet argent au profit des autorités fiscales, pour rien. Nous supposerons donc que vous avez opté pour une réduction effective de votre salaire.

Conséquences pour votre société

Hausse des revenus imposables ?

Étant donné que votre salaire est une dépense déductible pour votre société, sa réduction signifie non seulement qu’il reste plus d’argent dans la société, mais aussi qu’elle réduit ses dépenses déductibles. Cela n’implique toutefois pas nécessairement une hausse de son revenu imposable et donc des impôts à payer. Car il faut également tenir compte de l’évolution des autres coûts et revenus, sur laquelle la crise du coronavirus aura très probablement un impact. Ainsi, si vous réduisez votre salaire de 20 000 €, mais que votre chiffre d’affaires diminue du même montant (par souci de simplicité, nous supposons que rien d’autre ne change), le revenu imposable de votre société sera le même que l’année précédente.

Exclusion du taux réduit ?

Une des conditions pour bénéficier du taux réduit de l’impôt des sociétés est de disposer d’un salaire brut d’au moins 45 000 € ou, si le bénéfice imposable de votre société est inférieur à ce seuil, d’un salaire au moins égal à ce bénéfice imposable (art. 215, al. 3, 4° CIR 92) . La baisse de votre salaire peut signifier que cette condition de rémunération minimale pour le taux réduit ne sera plus remplie, de sorte que pour l’exercice d’imposition 2021 (exercice comptable 2020 ou 2020-2021), votre société paiera 25 % d’impôt sur ses bénéfices imposables jusqu’à 100 000 €, au lieu de 20 %.

Déjà tenir compte des conséquences ?

Le montant de la réduction de votre salaire dépendra bien évidemment avant tout de votre situation privée, c’est-à-dire de l’ampleur et de la durée de la réduction de revenu que vous pouvez vous permettre, et ensuite de l’importance des besoins de liquidités de votre société.

En principe, déjà prendre en compte l’impact de votre réduction salariale sur le résultat fiscal de votre société et sur le taux de l’impôt des sociétés n’a pas beaucoup de sens, car vous ne pouvez pas encore connaître ce résultat, ni d’ailleurs quelles mesures de relance fiscales seront encore adoptées cette année.

En outre, vous pouvez aussi éviter l’éventuelle insuffisance de frais déductibles et/ou la perte du taux réduit suite au non-respect de la condition de rémunération minimale en vous accordant un tantième après la clôture de l’exercice comptable en cours (2020 ou 2020-2021). En effet, ce tantième sera alors une charge déductible pour l’exercice écoulé et il sera pris en compte dans la rémunération pour la condition de rémunération minimale.

Conséquences sur le plan privé

Moins d’impôt et de cotisations sociales

Si votre salaire pour 2020 est inférieur à celui de 2019, vous devrez normalement payer moins d’impôt des personnes physiques pour 2020 que pour 2019, si rien d’autre ne change dans votre situation fiscale.

Par souci de clarté, précisons que cela ne signifie pas nécessairement que vous devrez payer moins au second semestre 2021 ou au premier semestre 2022, ou que vous récupérerez plus que d’habitude lorsque vous finaliserez votre déclaration pour 2020. Car votre société aura également déduit moins de précompte professionnel en 2020. Par ailleurs, il est intéressant de noter que si vous vous attribuez un tantième pour remplir la condition de rémunération minimale, ce tantième ne sera imposable que l’année prochaine.

Une réduction de votre salaire en 2020 aura également des conséquences sur vos cotisations sociales. Tout d’abord, vous devrez payer moins de cotisations sociales provisoires en 2023, car elles seront calculées sur votre rémunération imposable 2020. Ensuite, si votre rémunération pour 2020 passe sous l’un des six seuils, vous pourrez demander à votre caisse sociale une réduction de vos cotisations sociales provisoires pour cette année. Enfin, si vos cotisations provisoires pour 2020 ne sont pas réduites, voire éventuellement si elles le sont, les cotisations finales que vous devrez payer pour 2020 dans deux ou trois ans seront moins élevées et vous récupérerez donc une partie de vos cotisations provisoires.

Plus petite pension complémentaire ?

Une réduction de votre salaire peut également signifier que votre société ne pourra pas verser autant pour votre pension complémentaire cette année. En effet, les primes de votre assurance groupe ou de votre engagement individuel de pension (EIP) versées par votre société ne sont déductibles que dans la limite dite de 80 %, qui est calculée sur la base de votre rémunération. Une baisse de celle-ci signifie donc moins de primes déductibles pour votre pension complémentaire, du moins si vos primes sont calculées sur la base de la totalité de votre rémunération actuelle. Pour votre PLCI, la limite de 80 % ne s’applique pas, mais la déduction des cotisations est limitée à 8,17 % ou, pour une PLCI sociale, à 9,40 % de votre rémunération imposable, avec des plafonds de respectivement 3 291,30 € et 3 786,81 € pour 2020.

Comment procéder ?

Prélever un tantième en 2021 ne résoudra pas ce problème, car il ne sera pas pris en compte pour la limite de 80 % et, pour la PLCI, il sera considéré comme un revenu de l’année prochaine. Si vous réaugmentez votre salaire par la suite, vous pourrez combler le manque à gagner avec une prime de backservice. Votre capital de pension sera toutefois toujours légèrement inférieur à ce qu’il aurait été si vous n’aviez jamais réduit vos primes annuelles, car la période de placement des primes sera plus courte. Il n’y a pas de primes de backservice pour les PLCI.

Si votre société paie aussi des primes pour une assurance revenu garanti, une réduction de salaire entraînera une réduction du revenu garanti. Une prime de backservice n’est ici pas possible et n’aurait d’ailleurs pas de sens, puisque le risque couvert, à savoir une perte de revenu due à une incapacité de travail en 2020, ne sera bien entendu plus d’actualité lorsque l’année 2020 sera terminée.

CONSEILS

  • Il est préférable de réduire effectivement votre salaire, plutôt que de simplement en différer le paiement, car le précompte professionnel est calculé sur le salaire attribué (même non effectivement versé).
  • La réduction de salaire risque d’augmenter les revenus imposables de votre société, et/ou de lui faire perdre le bénéfice du taux réduit. Toutefois, vous n’en serez sûr qu’après la fin de l’exercice comptable et vous pourrez toujours résoudre le problème en vous versant un tantième.
  • Si vous réduisez votre salaire, vous devriez normalement payer moins d’impôt sur le revenu en 2020, et moins de cotisations sociales provisoires en 2023, voire éventuellement aussi en 2020.
  • Il est possible que les primes de votre assurance groupe/EIP/PLCI diminuent et que, par conséquent, votre capital pension complémentaire soit également réduit. Vous pourrez compenser en grande partie cette baisse, pour votre assurance groupe/EIP, en versant une prime de backservice plus tard.

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