MAUVAIS PAYEURS - 04.04.2023

Récupérer votre argent après avoir obtenu un jugement contre vos mauvais payeurs ?

Comment réagir au mieux à la suite d’un jugement en votre faveur obtenu contre un mauvais payeur ? Lors de la signification d’un commandement de payer, l’huissier peut-il approuver un plan de remboursement ? Quels biens du client pouvez-vous faire saisir ? À quoi devez-vous faire attention ? Le fait que votre client fasse ou non appel du jugement en première instance importe‑t‑il ? Pouvez-vous mettre la pression sur le client en le menaçant de le citer en faillite ? Dans quelle mesure cette citation en faillite comporte-t-elle des risques pour vous ?

Quelles étapes ?

Décompte

Vous avez obtenu un jugement qui condamne votre client à payer vos factures. Votre avocat va dans un premier temps envoyer un décompte à votre client ou à son avocat. En effet, outre les factures, le client devra s’acquitter d’autres indemnités accordées par le juge, comme des intérêts, une clause pénale en raison de retard de paiement, les frais d’assignation et une indemnité de procédure.

Appel ?

Le fait que votre client puisse faire appel ne vous empêche pas de faire exécuter le jugement. Sauf décision contraire du juge, un jugement est exécutoire par provision. Cela signifie que vous pouvez faire exécuter le jugement même si votre client fait appel. Toutefois, l’exécution du jugement se fera alors à vos risques et périls. S’il s’avère que vous avez tort en appel, vous risquez de devoir payer pour les dommages subis par votre client, parce que vous avez déjà exécuté le jugement qui a finalement été réformé.

Commandement de payer

Si votre client ne paie toujours pas malgré le décompte de votre avocat, vous pouvez transférer le jugement à un huissier de justice pour qu’il soit exécuté. L’huissier commencera alors par signifier à votre client le jugement, accompagné d’un commandement de payer. Dans ce dernier, l’huissier indiquera le montant que votre client doit vous verser. Comme vous devez faire appel à un huissier, les coûts pour votre client ne feront in fine qu’augmenter. En effet, à votre décompte s’ajoutent les frais de l’huissier de justice.

Plan de remboursement ?

Il arrive parfois que les clients demandent alors à l’huissier de justice de pouvoir établir un plan de remboursement pour le montant auquel ils ont été condamnés. En principe, l’huissier n’acceptera cette possibilité que si vous lui confirmez votre accord. Si vous acceptez un tel plan de paiement échelonné, veillez à ce qu’il stipule que le montant total est immédiatement exigible dès que les paiements échelonnés ne sont pas strictement respectés.

Saisie-exécution

Si l’huissier ne reçoit toujours pas de paiement après son commandement de payer, il peut procéder à une saisie-exécution des biens de votre client. Il peut p.ex. s’agir de biens immobiliers, ou des comptes que votre client détient auprès d’une banque. D’autres actifs peuvent être saisis, tels que les biens mobiliers appartenant à votre client (voitures, stocks, etc.), les créances que votre client peut avoir sur ses propres clients, etc.

La saisie peut suffire à obtenir le paiement. Dans le cas contraire, les actifs saisis peuvent être monnayés par l’huissier. Sachez que vous devrez peut‑être partager le produit de la vente avec les autres créanciers de votre client.

Frais

Les frais de saisie, qui doivent être payés à l’huissier, peuvent être importants. En tant que créancier, vous devrez les avancer. Votre client devra vous les rembourser par la suite. Néanmoins, il s’agit d’un domaine où les choses peuvent parfois mal tourner. Si votre client s’avère finalement insolvable, vous risquez de ne pas pouvoir récupérer les frais de saisie auprès de lui et de devoir les payer vous-même, ce qui ne fera qu’augmenter votre «perte».

Demandez dès lors à l’huissier de ne procéder aux saisies-exécutions que s’il estime que les recettes dépasseront les coûts.

Citation en faillite

Conditions

Si un paiement n’est pas effectué, vous pouvez, en tant que créancier, initier la faillite de votre client. Vous pouvez ainsi citer votre client en faillite par l’intermédiaire d’un huissier de justice. Il ne vous est possible de procéder ainsi que si votre client est une entreprise. Il peut s’agir d’une entreprise individuelle ou d’une société. En revanche, vous ne pouvez pas citer un consommateur en faillite.

Pour que votre client puisse être déclaré en faillite, il doit avoir cessé de payer de manière persistante. À cet effet, il suffit qu’il ait des problèmes de liquidités durables. En revanche, il n’est pas nécessaire qu’il ne paie plus aucun créancier. De plus, le crédit de votre client doit être ébranlé (art. XX.99 C. éco.) . Ce sera p.ex. le cas si votre client n’obtient plus de crédit auprès de la banque.

Moyen de pression ?

Si vous citez votre client en faillite, il est possible que ce dernier fasse tout ce qui est en son pouvoir pour payer sa dette. De cette manière, il peut encore échapper à la faillite. En effet, il pourra dire au tribunal saisi de l’affaire qu’il a déjà payé votre créance.

Si votre citation débouche sur une faillite, vous saurez de façon plus précise si votre facture sera payée. En initiant la faillite, vous vous assurez également que votre débiteur ne pourra plus contracter de dettes ni faire disparaître ses avoirs. En effet, le tribunal désignera, dans le jugement déclaratif de faillite, un curateur qui continuera à gérer les biens de votre client.

Si vous ne disposez pas d’un privilège (ou d’une autre garantie), il y a peu de chances que vous puissiez récupérer quoi que ce soit de votre créance en cas de faillite. En revanche, vous pourrez généralement récupérer les frais d’assignation. Ceux-ci sont en effet privilégiés.

Cessation de paiement

Il arrive que, après sa citation en faillite, le client vous paie une créance encore ouverte (p.ex. des factures non échues) en plus de ce que le jugement vous accorde. Il n’est pas certain que vous pourrez conserver ce montant en cas de déclaration de faillite ultérieure. En effet, lorsque le tribunal déclare la faillite, il fixe également la date de cessation des paiements. En principe, il s’agit de la date du jugement déclaratif de faillite lui-même, mais le curateur peut également demander de la fixer à une date antérieure «si des éléments sérieux et objectifs indiquent clairement que la cessation de paiement a eu lieu avant le jugement». Si vous recevez un paiement après la date de cessation des paiements pour des dettes non échues, le curateur peut alors très bien vous réclamer cet argent.

Risque

Menacer un client mauvais payeur de le citer en faillite n’est pas sans risque. Votre créance peut parfois constituer un abus de droit. C’est le cas, plus précisément, s’il existe une disproportion manifeste entre votre intérêt à la demande en faillite et les intérêts lésés par l’octroi de la demande. S’il y a abus de droit, votre client peut vous demander des dommages et intérêts (Cass., 28.11.2013) . Il est donc recommandé de consulter votre avocat avant d’émettre une citation en faillite.

CONSEILS

  • Après le jugement, votre avocat va établir un décompte dans lequel il reprendra, outre le montant principal, les intérêts, frais de citation, frais de procédure…
  • Si votre client ne paie toujours pas, vous pouvez faire signifier le jugement par un huissier de justice, avec un commandement de payer. Les frais de l’huissier de justice sont en principe à la charge du client, mais s’il s’avère finalement que votre client est insolvable, vous les paierez de votre poche.
  • Si cela ne suffit pas, votre huissier de justice peut procéder à une saisie sur les actifs de votre client. Ceux-ci peuvent être vendus, et la recette sera partagée par la suite entre les créanciers.
  • Vous pouvez éventuellement émettre une citation en faillite, mais ce n’est pas toujours sans risque. Vérifiez auprès de votre avocat si les conditions de la faillite sont bien remplies et si votre créance ne constitue pas un abus de droit. Si c’est le cas et si vous faites quand même émettre la citation, vous risquez de devoir payer des dommages et intérêts.

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