DROIT - RÉGIMES MATRIMONIAUX - 25.05.2023

Les conséquences (fiscales) d’une «confusion» sur un compte

La confusion résultant du versement d’argent propre à un conjoint sur un compte commun constitue en pratique un gros problème pour un couple marié. Qu’en est-il en cas de divorce d’après un nouvel arrêt de cassation ? Et qu’en dit le fisc ?

Les règles

Le régime légal. Plus de 80 % des couples sont mariés sous le régime légal, dit de «communauté d’acquêts». Dans ce régime légal, tout est commun, sauf les biens détenus avant le mariage ou acquis durant le mariage par donation ou succession. Ces derniers sont dits «propres» au conjoint qui les détient. Si vous êtes marié en séparation de biens pure et simple, vous n’avez bien sûr pas de patrimoine commun.

Une présomption légale. Dans le régime légal, on présume que tous les biens sont communs, sauf preuve du contraire (art. 2.3.22, §3) . Celui qui prétend que tels biens lui sont propres (provenant p.ex. d’une donation ou d’une succession) doit donc être en mesure de le prouver.

Gare aux confusions !

Surtout pour de l’argent et des titres. En pratique, une confusion se produit surtout lors de donations d’argent et de titres (actions, obligations, fonds…). Ce sera p.ex. le cas si vous déposez une somme d’argent donnée, qui vous est donc propre, sur un compte commun. En pratique, une autre erreur fréquente consiste à maintenir les revenus (intérêts et dividendes) d’un portefeuille de placements (détenu ou non par une «société simple»), qui sont donc communs, dans le portefeuille lui-même, qui est un bien propre.

Souvent par le biais des revenus. Ces revenus sont ensuite réinvestis dans ce portefeuille, de sorte qu’après quelques années, on ne voit plus du tout ce qui est propre et ce qui est commun. Versez donc toujours les revenus (intérêts et dividendes) sur un compte commun distinct pour éviter une telle confusion.

Les conséquences (fiscales)

La jurisprudence antérieure. Elle était très stricte, disant que de l’argent propre versé sur un compte commun appartenait à la communauté, sauf preuve du contraire. En outre, on présumait alors aussi qu’un conjoint qui met de l’argent qui lui est propre (ou des titres) sur un compte commun, n’avait pas l’intention de les tenir séparés. En cas de divorce ou de décès, il fallait dès lors apporter une double preuve : (1) que l’argent ou les titres sont des biens propres et (2) qu’il n’y a pas eu d’intention de les rendre communs.

La jurisprudence actuelle. Un récent arrêt de cassation (Cass., 17.03.2022) a assoupli la preuve à administrer. Le conjoint qui prouve que seuls les intérêts et/ou les dividendes ont été comptabilisés avec de l’argent propre à un conjoint et que celui-ci peut encore individualiser cet argent, il peut continuer à considérer cet argent, sans les revenus, comme un bien propre. Il suffit donc que tout soit resté «traçable». Cette vision de la Cour de cassation avait déjà été adoptée, dans une large mesure (mais pas totalement), par le fisc flamand (position n° 15034, 20.06.2022) et aura aussi un impact dans les autres Régions, vu que le droit fiscal doit suivre le droit civil.

Mieux vaut prévenir… Celui qui est marié sous le régime légal fera bien de maintenir de l’argent ou des titres qui lui sont propres sur un compte qui lui est propre et de faire aboutir les revenus (intérêts et dividendes) sur un compte commun pour éviter les discussions. Autre solution envisageable : déroger par le biais du contrat de mariage (coût : ± 600 €) à la règle qui rend communs les revenus de biens propres. Et si une confusion est déjà intervenue par le passé, faites en sorte que tout reste traçable, p.ex. au moyen des documents bancaires.

Il vaut mieux des biens propres tenir séparés des biens communs. Dissociez-les aussi de leurs revenus, vu que ceux-ci sont en principe communs. Si des confusions se sont déjà produites par le passé, il suffit depuis peu que tout soit resté «traçable», p.ex. par le biais des documents bancaires.

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