Règle des 80 % – excédents de prime 2021/2022 – la tolérance administrative n’a pas de limite de temps
Règle des 80 %
Réforme de la pension légale
À la suite de la réforme de la pension légale des indépendants, l’administration fiscale a adapté les règles de calcul de cette pension légale au niveau de la règle des 80 % (circ. 2022/C/33, 31.03.2022)(voir aussi FiscalPro, année 6, n° 7, p. 8, 03.04.2023) . Et, en raison de l’adaptation de ces règles de calcul, il se peut qu’il y ait moins de place dans le cadre de cette règle des 80 % pour encore verser des primes dans votre EIP. Or les primes payées en trop doivent normalement être considérées comme des dépenses non admises (DNA).
Tolérance administrative
En raison de l’adaptation rétroactive de ces règles, l’administration fiscale accepte que les primes payées en trop en raison de ce changement en 2021 et 2022 – les «excédents» de primes 2021 et 2022 – soient reportées à 2023 (circ. 2022/C/79, 29.08.2022) . Par conséquent, ces excédents ne doivent pas être repris comme DNA dans la déclaration à l’impôt des sociétés des exercices d’imposition (EI) 2022 et 2023. Toutefois, au cours de la période imposable (exercice comptable) liée à l’EI 2023 (en principe, l’exercice comptable 2022), votre société doit comptabiliser l’excédent de prime dans un compte 49 «Charges à reporter».
Attention 1 ! Cette tolérance ne s’applique pas aux contrats venant à échéance en 2021, 2022 ou 2023.
Attention 2 ! Elle ne s’applique pas non plus à la partie des primes qui se rapporte à un backservice appliqué pendant les cinq dernières années du contrat.
Avance 2023
La partie non déductible de la prime sera alors considérée comme une forme d’avance, qui sera ensuite prise en compte en 2023 pour vérifier le respect de la limite de 80 % visée à l’article 59, CIR 92. Cette avance doit donc être prise en compte dans le calcul de la limite de 80 % pour 2023. Évidemment, le compte 49 doit être apuré au cours de cet exercice comptable. L’excédent de prime reporté est alors comptabilisé comme prime, et la prime effectivement due est diminuée à concurrence du même montant.
Pas de limite de temps
Nouvelle tolérance administrative
Il est possible que l’excédent de prime reporté de 2021 et 2022 soit supérieur à la prime déductible pour 2023. Dans sa circulaire (circ. 2023/C/10, 16.01.2023) , l’administration fiscale confirme que vous pouvez alors reporter ces excédents de prime, considérés comme des avances pour les primes dues après les exercices d’imposition 2022 et 2023, sans limite dans le temps .
Exemple
Supposons qu’en 2021, vous ayez versé dans votre EIP une prime annuelle de 10 000 € et une prime de backservice de 100 000 €. En 2022, vous avez aussi versé une prime de 10 000 €. Or, sur la base des nouvelles règles de calcul des 80 % (circ. 2022/C/33, 31.03.2022) , vous ne pouviez verser, en 2021, que des primes de respectivement 8 000 € (prime périodique) et 80 000 € (backservice).
En 2022 également, vous ne pouviez verser qu’une prime périodique de 8 000 €. Vous avez donc des excédents de primes de 22 000 € (2021) et de 2 000 € (2022). Votre société utilise la tolérance administrative (et passe les écritures nécessaires) et reporte 24 000 € à 2023.
En 2023, la prime déductible est, par hypothèse, toujours de 8 000 €. Sur les 24 000 € reportés, seuls 8 000 € peuvent donc être déduits en 2023. Cela signifie que 16 000 € (24 000 € − 8 000 €) doivent être reportés à 2024. En supposant qu’en 2024 et les années suivantes, la prime déductible soit toujours de 8 000 €, vous ne pourrez pas verser de nouvelle prime avant 2026.
Conseil. Dans sa dernière circulaire (circ. 2023/C/10, 16.01.2023) , l’administration fiscale a également confirmé que vous pouvez tenir compte d’une pension maximale inférieure pour les années antérieures à 2021. Cela peut donc vous donner une certaine marge de manœuvre dans le cadre de la règle des 80 %.
Nouveau calcul
Il est possible que cette confirmation du fisc soit une bonne nouvelle pour vous, surtout si vous avez payé une prime de backservice importante en 2021 ou 2022, et que vous aurez donc besoin de plusieurs années pour éliminer vos excédents de prime. N’hésitez pas à contacter votre courtier pour (re)voir votre contrat et faire recalculer la limite de 80 % si nécessaire.
Sur quelle rémunération calcule-t-on votre prime déductible ?
Le salaire de l’année en cours ?
Comme vous ne connaissez pas votre dernier salaire (celui de l’année précédant votre pension) au moment de la déduction des primes, la limite de 80 % est calculée chaque année sur la base du salaire effectivement versé par la société au cours de cette même année, à condition que ce salaire ait été payé ou attribué régulièrement (c.‑à-d. au moins une fois par mois) et avant la fin de l’exercice comptable (art. 195 CIR 92) . Un tantième n’entre donc pas en ligne de compte.
Uniquement les salaires «normaux»
Le terme «normal» figure dans la loi comme une sorte de disposition anti-abus. Il permet au fisc de refuser la déduction des primes calculées sur la base de salaires exceptionnels qui ne seraient accordés que pour contourner la limite de 80 % (Com. IR 92 n° 59/32) . Prenons l’exemple d’un complément de salaire important dans l’année qui précède votre départ à la retraite, uniquement ou principalement dans le but d’encore déduire une prime importante (backservice).
Changement en vue
Selon les projets de réforme du ministre des Finances, à partir du 1er janvier 2024, la limite de 80 % sera remplacée par une limite moins complexe, correspondant à un simple pourcentage du salaire effectivement payé ou octroyé au cours de l’année de déduction des primes. Concrètement, la déduction des primes serait limitée à 12 % des salaires jusqu’à ± 71 000 € et à 32 % des salaires plus élevés.