Investisseur obligataire défensif : que faire ?
Des investisseurs défensifs. En matière de placements, la plupart des Belges ont un profil assez défensif. Contrairement p.ex. aux américains, qui privilégient souvent les actions, la plupart de nos compatriotes optent pour des formes de placement plutôt dénuées de risques. Les obligations représentent dès lors 50 à 70 % des portefeuilles de placement des clients private banking.
Réinvestir ? Les taux d’intérêt sont à un niveau plancher sans précédent. Pour nombre d’investisseurs, c’est un cauchemar. De nombreux gestionnaires de portefeuilles s’arrachent aussi les cheveux. De plus en plus d’obligations encore assorties d’un coupon alléchant arrivent en effet à échéance. Les alternatives pour réinvestir sont toutefois réduites. Certains conseillers recommandent même à leurs clients de placer provisoirement leur argent sur un compte d’épargne, plutôt que de le réinvestir dans des obligations au maigre coupon.
Une bonne stratégie ? Selon la plupart des observateurs, les taux sont appelés à remonter. Ils ne voient donc guère d’utilité à acheter des obligations à taux bas et à long terme en euros. Une hausse des taux générera en effet pour les détenteurs d’obligations des moins-values susceptibles de rendre négatif le rendement total de leur portefeuille. Nul ne peut toutefois prédire l’avenir et déterminer quand les taux à long terme entameront leur remontée. L’économie européenne n’est en effet pas vraiment florissante. Même le moteur allemand commence à avoir des ratés. En Europe, la croissance du PIB est aussi nettement moins élevée qu’aux États-Unis. Une hausse des taux n’est donc pas encore pour demain. L’expérience montre en outre que certaines régions peuvent être confrontées pendant une longue période à des taux d’intérêt très bas (songez au Japon et à la Suisse, où c’est le cas depuis des dizaines d’années).
Devises étrangères. De nombreux gestionnaires de patrimoine proposent actuellement à leurs clients de se tourner vers des obligations en devises étrangères. Non seulement les populaires obligations en dollars australiens et néo-zélandais, mais aussi des obligations libellées dans des devises plus exotiques, comme le peso mexicain et le real brésilien, apparaissent ainsi dans de nombreux portefeuilles de placements. Cela présente toutefois des risques. Depuis l’apogée de la crise de l’euro, la couronne norvégienne a p.ex. déjà baissé de 10 %.
Haut rendement. Dans leur quête de rendement, certains gestionnaires parient parfois aussi sur des obligations de qualité douteuse. Un rendement de 4 % à 5 % ne semble certes guère spectaculaire à première vue mais dans le climat actuel des taux, c’est considérable. C’est ce rendement en apparence modeste qui amène parfois les investisseurs à sous-estimer les risques liés à ces obligations à «haut rendement».
Des actions à dividende élevé. Les actions belges qui distribuent un joli dividende, comme Elia, Fluxys, etc., sont une autre alternative assez prisée. Si un investissement dans de telles actions se justifie certainement, si vous réinvestissez systématiquement en actions à dividende élevé l’argent d’obligations échues, le profil de risque de votre portefeuille s’en trouvera toutefois modifié.
Des placements «privés». Les investisseurs plus fortunés se voient de plus en plus souvent proposer des projets requérant une mise de 250 000 € ou plus dans l’immobilier, l’énergie verte, etc. Si les rendements évoqués sont élevés, restez toutefois vigilants. Certaines banques privées ont déjà dû constater à leurs dépens que les rendements affichés ne sont pas toujours atteints et que leurs clients subissent parfois de fortes pertes. Ne perdez pas non plus de vue qu’il s’agit en général de placements peu liquides et qu’en période de basse conjoncture, il est souvent impossible de s’en défaire sans subir de fortes pertes.
Stratégie. Les investisseurs obligataires défensifs doivent veiller à ne pas accroître systématiquement sans s’en rendre compte le risque lié à leur portefeuille. Vu que les taux d’intérêt peuvent se maintenir encore longtemps à un niveau bas, il est quand même judicieux de réinvestir, à long terme, une grande partie des obligations échues dans des obligations de qualité libellée en euros. Veillez toutefois à bien répartir vos échéances dans le temps, pour pouvoir réagir rapidement à une hausse des taux, dès que celle-ci interviendra. Vous pouvez bien sûr aussi vous demander si votre portefeuille n’est pas trop défensif, mais le choix d’investir en actions sera alors délibéré. À cet égard, il est certainement aussi opportun, dans une perspective de long terme, d’investir 10 % à 15 % de votre portefeuille obligataire en devises de certains marchés émergents.