ENTREPRISE EN NOM PERSONNEL - CESSION - 15.05.2018

Un quasi-apport fait sans un rapport d’évaluation...

Une pharmacienne vend son activité en nom personnel à une société. Le fisc requalifie les plus-values de cessation déclarées, car aucun rapport d’évaluation n’a été établi pour un tel «quasi-apport». Qu’en a dit la justice ?

H. constitue en 2010 une SPRL à laquelle elle vend son officine de pharmacie, avec son mobilier, ses appareils et son stock. H. lui vend ce stock à sa valeur comptable, tout le reste avec une plus-value qu’elle déclare ensuite comme étant une plus-value de cessation sur immobilisations corporelles (I.C.).

Position de l’administration

Le fisc y voit au contraire une plus-value sur immobilisations incorporelles (I.I.) : bref, du «goodwill». Or, il n’y avait pas eu d’inventaire ou de rapport d’évaluation des biens cédés. La cession s’était faite avec application de l’art. 11 CTVA. C’est donc une universalité de biens qui avait été cédée, ce qui inclut aussi la cession du goodwill. Le goodwill, c’est en effet le prix payé pour acquérir une entreprise dans la mesure où il dépasse la valeur nette de ses actifs moins son passif (art. 95, §1, II, al. 4 AR/C. soc.) .

Position du juge

La Cour d’appel d’Anvers donne tort au fisc. Il transparaît en effet du contrat et de la facture de cession de tous ces actifs que celle-ci portait exclusivement sur les I.C. et le fait qu’un rapport d’évaluation ou un inventaire n’ait pas été établi n’y change rien. Ensuite, l’art. 11 CTVA peut aussi s’appliquer si tous les éléments d’une entreprise ne sont pas cédés. Enfin, la référence à l’AR/C. soc. n’est pas un argument valable, car cet AR ne s’appliquait pas à H. De plus, l’alinéa cité de cet AR ne concerne que les I.I. et n’implique aucunement que la partie du prix qui dépasse la valeur résiduelle des éléments cédés est à qualifier de goodwill.

Commentaire

I.C. ou I.I. : une différence fiscale ? Oui et pas minime. Les plus-values de cessation sur I.C. sont imposées à 16,5 % (art. 171, 4°, a CIR 92) et celles sur I.I. à 33 % jusqu’au plafond de la «règle des 4x4» (art. 171, 1°, c CIR 92) et aux taux progressifs pour ce qui excède ce plafond. Ce deuxième type de plus-values de cessation est donc plus intéressant que le premier, pour le fisc s’entend...

Une décision correcte ? Oui, la cour d’appel réfute de façon fondée tous les arguments du fisc. Elle a déjà jugé voici quelque temps, à juste titre là aussi, que l’absence du rapport d’évaluation n’implique nullement que le contrat de vente est simulé et que le fisc pourrait dès lors ne pas en tenir compte (Anvers, 31.10.2016) .

Donc pas besoin d’un rapport d’évaluation ? Si. La cour d’appel dit seulement que le fisc ne peut pas déduire de l’absence d’un tel rapport qu’il y a eu d’autres actifs de cédés que ceux indiqués dans le contrat de cession. Mais cela n’empêche pas qu’au regard du droit des sociétés, il aurait fallu faire établir un rapport d’évaluation par un réviseur d’entreprises, vu que la vente était un quasi-apport (art. 220-222 C. soc.) .

Attention !  Ne soyez pas tenté de céder les I.I., mais d’en déguiser le prix sous un prix exagéré, non conforme à celui du marché, pour les I.C., car là, vous risquez que le fisc n’invoque à juste titre une simulation.

Vous trouvez l’arrêt de la Cour d’appel d’Anvers du 20.03.2018 (décision originale en néerlandais) sur http://astucesetconseils-impots.be/annexe  - code IM 24.14.07.

Le droit des sociétés impose de faire établir un rapport d’évaluation par un réviseur d’entreprises pour un quasi-apport, mais en cas d’omission, le fisc ne peut en déduire que d’autres actifs que ceux spécifiés dans le contrat de cession ont aussi été cédés, en particulier des I.I. davantage imposées que des I.C.


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