OBLIGATIONS DES TRAVAILLEURS - 28.01.2019

Vos secrets d’affaires mieux protégés ?

En tant qu’employeur, que pouvez-vous faire si un travailleur utilise ou divulgue de manière illicite un secret d’affaires ?

Quelles solutions vous offre la nouvelle loi depuis le 24.08.2018 dans de telles situations (L. 30.07.2018, MB 14.08.2018)  ? Pouvez-vous tout simplement demander des dommages et intérêts ? Vos informations confidentielles sont-elles à présent mieux protégées durant la procédure judiciaire ?

Confidentialité

Loi relative aux contrats de travail

Dans le droit du travail belge (art. 17, loi relative aux contrats de travail) , existait déjà l’obligation pour le travailleur de s’abstenir d’utiliser ou de divulguer un secret d’affaires dont il a pu avoir connaissance dans l’exercice de son activité professionnelle. Cette loi stipulait qu’il est interdit au travailleur «de divulguer les secrets de fabrication, ou d’affaires, ainsi que le secret de toute affaire à caractère personnel ou confidentiel dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de son activité professionnelle ou après la cessation de celui-ci»(art. 17, 3° a) . Le travailleur ne peut en outre pas se livrer à tout acte de concurrence déloyale. Vous pouvez aussi reprendre une clause de non-concurrence sous de strictes conditions dans votre contrat de travail.

Maintenant adaptée

La loi du 30 juillet 2018 (MB 14.08.2018) transpose une directive européenne (UE 2016/943, 08.06.2016) dans le droit belge. L’ancienne notion de secret de fabrication ou d’affaires disparaît maintenant de la loi relative aux contrats de travail et est remplacée par la notion de secret d’affaires, afin que la loi soit conforme à la directive. Au niveau du contenu, il y a cependant peu de différence, car les deux anciennes notions continuent d’être visées par la notion de secret d’affaires. Avec la nouvelle loi, les définitions du secret d’affaires et de (l’interdiction de) l’obtention, l’utilisation ou la divulgation de celui-ci de manière illicite sont clairement précisées. Ces définitions ne sont toutefois pas reprises dans la loi relative aux contrats de travail, mais dans le Code de droit économique.

Secrets d’affaires

Définition

Un secret d’affaires est une information qui est secrète (pas généralement connue ou aisément accessible aux personnes qui s’occupent du genre d’informations en question), a une valeur commerciale, et fait l’objet de dispositions raisonnables destinées à la garder secrète (dispositions contractuelles, sécurité physique ou virtuelle, ...).

Obtention ou utilisation illicite

L’obtention d’un secret professionnel sans l’accord de son détenteur est considérée comme illicite lorsqu’elle est réalisée par un accès non autorisé à ou une appropriation ou copie non autorisée de tout document, objet, matériau, substance ou fichier électronique que le détenteur du secret d’affaires contrôle de façon licite et qui contiennent ledit secret d’affaires, ou par tout autre comportement qui, eu égard aux circonstances, est considéré comme contraire aux usages honnêtes en matière commerciale.

L’utilisation ou la divulgation d’un secret d’affaires est considérée comme illicite lorsqu’elle est réalisée, sans le consentement du détenteur du secret d’affaires, par une personne dont il est constaté qu’elle répond à l’une ou l’autre des conditions suivantes : elle a obtenu le secret d’affaires de façon illicite ; elle agit en violation d’un accord de confidentialité ou de toute autre obligation de ne pas divulguer le secret d’affaires ; elle agit en violation d’une obligation contractuelle ou de toute autre obligation limitant l’utilisation du secret d’affaires.

L’obtention, l’utilisation ou la divulgation d’un secret d’affaires est aussi considérée comme illicite lorsque, au moment de l’obtention, de l’utilisation ou de la divulgation du secret d’affaires, une personne savait ou, eu égard aux circonstances, aurait dû savoir que ledit secret d’affaires avait été obtenu directement ou indirectement d’une autre personne qui l’utilisait ou le divulguait de façon illicite.

En pratique

Contrat de travail

En tant qu’employeur, l’entreprise est suffisamment protégée par l’obligation de confidentialité qui est imposée à l’article 17 de la loi relative aux contrats de travail à vos travailleurs tant au cours du contrat de travail qu’après la cessation de celui-ci. La loi n’impose bien entendu pas de restrictions aux (anciens) travailleurs de faire usage de l’expérience générale et des compétences acquises, pour autant que cela se passe d’une manière normale et honnête. Seul l’usage malhonnête d’une telle connaissance est interdit sur la base de l’article 17. Il n’est donc absolument pas nécessaire d’encore reprendre cette obligation dans un contrat de travail, à moins que vous ne souhaitiez également limiter l’utilisation de secrets d’affaires tout court. Si c’est le cas, une telle clause peut être insérée dans le contrat de travail.

Les dispositions relatives aux secrets d’affaires ne peuvent pas être interprétées comme permettant de restreindre la mobilité des travailleurs (art. XI.332/2 C. éco.) . Cela signifie que vous ne pouvez pas utiliser ces dispositions pour limiter l’utilisation par les travailleurs d’informations qui ne constituent pas un secret d’affaires, ni limiter l’utilisation par les travailleurs de l’expérience et des compétences acquises de manière honnête dans l’exercice normal de leurs fonctions, ni imposer aux travailleurs dans leur contrat de travail des restrictions supplémentaires autres que celles imposées conformément au droit de l’Union européenne ou au droit national.

En cas de collaboration avec des freelances ou des indépendants, un accord ou une clause de confidentialité est certainement à conseiller afin d’assurer le secret des informations sensibles de l’entreprise, vu que cela n’est pas visé dans l’article 17 de la loi relative aux contrats de travail.

Comment traiter les infractions ?

Si vous pouviez prouver les faits et si ceux-ci étaient suffisamment graves, vous pouviez aussi, dans le passé, procéder au licenciement pour motif grave et réclamer une indemnité. Vous pouviez en outre déposer une plainte au pénal. Est puni d’une peine d’emprisonnement de trois mois à trois ans et/ou d’une amende de 50 € à 2 000 €) «celui qui aura méchamment ou frauduleusement communiqué des secrets de la fabrique dans laquelle il a été ou est encore employé»(art. 309 C. pén.) .

La nouvelle loi prévoit maintenant expressément que vous pouvez intenter une procédure en référé. L’urgence ne doit pas être démontrée. La nouvelle loi cite expressément cette action au rang des «possibilités». Vous pouvez, au cours de la procédure, demander d’imposer des mesures provisoires et conservatoires (cessation de l’utilisation du secret d’affaires, interdiction de commercialisation des produits contrefaits, ...).

Démontrer l’étendue de votre dommage n’est en général pas évident. La loi stipule maintenant expressément que le juge peut, de manière raisonnable et équitable, fixer un montant forfaitaire à titre de dommages et intérêts lorsque l’étendue du préjudice ne peut être déterminée d’aucune autre manière. L’évaluation du dommage était souvent une pierre d’achoppement dans le passé.

Confidentialité ?

La loi prévoit également des moyens permettant de garantir la confidentialité des secrets d’affaires durant la procédure. Il y a tout d’abord une obligation de confidentialité pour tout un chacun qui a connaissance de secrets d’affaires dans le cadre d’une procédure judiciaire. En outre, le juge peut limiter l’accès aux documents ou audiences et mettre à disposition une version non confidentielle de la décision judiciaire.

Conseils

  • La nouvelle loi précise plus clairement quelles informations sont protégées et quelles opérations sont interdites. Vous n’êtes donc plus obligé d’insérer de clause en la matière dans vos contrats de travail.
  • La loi prévoit maintenant explicitement la possibilité de demander des mesures provisoires et conservatoires comme en référé. Elle stipule en outre explicitement que le juge peut imposer un montant forfaitaire de dommages et intérêts lorsque l’étendue du préjudice ne peut être déterminée d’aucune autre manière.
  • Si les faits sont suffisamment graves, vous pouvez aussi procéder au licenciement pour motif grave. Vous pouvez également introduire une plainte au pénal (avec constitution de partie civile).
  • N’hésitez certainement pas à intenter une procédure si un travailleur continue d’enfreindre son devoir de confidentialité après une mise en demeure, même si cette procédure a peu de chance de succès. Une telle procédure a souvent un effet dissuasif. La nouvelle loi prévoit diverses mesures afin de garantir la confidentialité de votre secret d’affaires durant la procédure.

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