PROTECTION EXTRAJUDICIAIRE - 07.06.2019

Le mandat (de protection) désormais élargi ?

Depuis le 1er  mars 2019 (L. 21.12.2018) , le champ d’application de la protection extrajudiciaire – sous forme d’un mandat de protection – a été considérablement élargi, et le mandant a désormais davantage voix au chapitre. Quel est l’impact de cette modification, pour vous ?

En outre, tous les mandats prennent à présent automatiquement fin lorsque le mandant est déclaré incapable. Quelles sont les conséquences pour vous, dans le cas d’une société ou d’un contrat de gestion patrimoniale discrétionnaire ?

Le mandat de protection

Protection

Certains adultes ne sont pas (ou plus) en mesure de s’occuper eux-mêmes de leurs intérêts lors de la prise de certaines décisions. Ils ont besoin d’une protection, plus ou moins importante. Depuis le 1er  septembre 2014, deux systèmes sont prévus pour protéger une personne et/ou ses biens : la protection extrajudiciaire et la protection judiciaire. Ce dernier statut de protection s’applique dans le cas du majeur qui, en raison de son état de santé physique ou mentale, est totalement ou partiellement incapable d’assumer lui-même, comme il se doit, temporairement ou définitivement, la gestion de ses biens ou de ses droits personnels (art. 488/1 C. civ.) , ainsi qu’aux majeurs qui se trouvent dans un état de prodigalité (art. 488/2 C. civ.) .

Protection extrajudiciaire

Dans le cas d’une protection judiciaire, le juge de paix met en place un accompagnement sur mesure pour la personne protégée. Il désigne un administrateur pour l’assister ou la représenter.

Dans le cas de la protection extrajudiciaire, c’est la personne qui souhaite qu’on effectue certaines opérations en son nom dans le cadre de la gestion de ses biens qui donne elle-même un mandat à une personne de confiance pour le faire, sans que le juge doive intervenir. Les personnes qui sont encore capables d’exprimer leur volonté peuvent même prendre des mesures qui seront d’application au moment où elles seront incapables. Elles peuvent ainsi décider elles-mêmes de la manière dont leur patrimoine devra être géré quand elles ne seront plus en mesure de s’en occuper.

Le mandat de protection

La protection extrajudiciaire est organisée par le biais d’un mandat, comme le prévoient les articles 489 et suivants du Code civil. Dans ce cadre, une personne, le mandant, donne un mandat portant sur la gestion complète ou partielle de ses biens à une personne de confiance, le mandataire, qui est généralement un membre de sa famille. Le mandataire peut pleinement représenter le mandant pour toutes les opérations couvertes par le mandat, et donc agir en son nom et pour son compte.

Conditions de validité

Il va de soi que le mandant doit être capable d’exprimer sa volonté au moment où il donne le mandat. Par ailleurs, le mandat doit avoir pour but spécifique d’organiser ladite protection extrajudiciaire. Enfin, il doit être enregistré au Registre central des contrats de mandat, tenu par la Fédération royale du notariat belge (art. 490, al. 1 C. civ.) . Un mandat de protection est presque toujours octroyé par acte notarié.

Entrée en vigueur

Le mandant peut librement organiser l’entrée en vigueur du mandat. Celui-ci peut produire ses effets immédiatement, ou uniquement au moment auquel le mandant sera jugé incapable. Ainsi, vous pouvez décider que le mandat de protection sera effectif après la constatation de l’incapacité du mandant sur la base de deux attestations médicales distinctes. Il n’est donc pas nécessaire d’avoir recours au juge de paix pour obtenir l’entrée en vigueur d’un mandat extrajudiciaire.

Directives

Le mandant peut spécifier, dans le mandat, un certain nombre de principes que le mandataire doit respecter dans l’exercice de sa mission, comme la manière dont ses biens devront être administrés (art. 490, al. 3 et 490/1, §1, al. 2 C. civ.) .

Extension à la personne

Initialement, la protection extrajudiciaire ne pouvait porter que sur la gestion des biens. Dès que l’on en arrivait à la protection de la personne, il fallait nécessairement emprunter la voie judiciaire.

La loi du 21 décembre 2018 a cependant étendu la protection extrajudiciaire à tout ce qui touche à la personne elle-même, et ce à compter du 1er  mars 2019. Ainsi, le mandat peut désormais également servir de base pour un placement en maison de repos.

Nouveauté : la concertation

Désormais, le mandataire est tenu d’associer le mandant, dans toute la mesure du possible et compte tenu de son degré de compréhension, à l’exercice de sa mission (art. 490/2, §1, al. 3 C. civ.) . Concrètement, le mandataire doit se concerter avec le mandant au sujet de l’exécution de sa mission, ainsi que, le cas échéant, avec les personnes désignées par le mandant, et ce à intervalles réguliers et au moins une fois par an.

Fin

La protection extrajudiciaire prend fin lorsque les conditions prévues aux articles 488/1 et 488/2 du Code civil ne sont plus remplies (incapacité en raison de l’état de santé ou prodigalité) ou au décès ou placement sous protection judiciaire du mandant ou du mandataire. De plus, la protection extrajudiciaire prend désormais également fin suite à la renonciation ou à la révocation du mandat par le mandataire ou par le mandant (art. 490/2, §3 C. civ.) . Jusqu’il y a peu, cette fin ne survenait qu’au moment de la notification.

Mandat ordinaire

Incapacité du mandant

La loi du 21 décembre 2018 modifie également l’article 2003 du Code civil. Elle précise que tous les mandats, y compris les mandats généraux ou spéciaux visés à l’article 1987 du Code civil, qui ne répondent pas aux exigences prévues pour le mandat de protection (art. 490 et 490/1 C. civ.) , prennent fin lorsque le mandant se retrouve en incapacité de fait ou lorsqu’il est question de prodigalité dans son chef. Cette disposition vaut également pour les mandats bancaires.

Le mandat de protection constitue une exception spécifique à ce principe. Il n’expire pas lorsque le mandant est déclaré incapable ou se trouve dans un état de prodigalité.

Société

Cette nouvelle disposition législative est également pertinente dans le cadre de l’administration d’une société, étant donné que le mandat du gérant est généralement qualifié de mandat des associés (mandants) au gérant (mandataire). Le nouveau droit des sociétés le confirme expressément (art. 4:8 CSA, entré en vigueur le 01.05.2019) .

Le législateur a adapté l’article 2003 du Code civil sur ce point, et clarifie donc le fait que le mandat ordinaire octroyé dans le cadre d’une société peut subsister si l’un des associés est déclaré incapable ou en état de prodigalité, si c’est expressément prévu par les statuts (art. 2003, al. 2 C. civ.) . En d’autres termes, si l’acte constitutif ne le prévoit pas, la gérance prendra fin si l’un des associés est déclaré incapable. Pour la plupart des sociétés existantes, il conviendra dès lors de procéder à une modification des statuts sur ce point, afin de remédier à ce risque.

Gestion patrimoniale

Par ailleurs, la loi prévoit que le mandat stipulé dans un contrat de gestion patrimoniale discrétionnaire ou dans le cadre d’un mandat hypothécaire peut subsister si le mandant est déclaré incapable, si cette volonté a été expressément exprimée.

CONSEILS

  • Un mandat de protection vous permet de prendre des mesures pour le jour où vous ne serez plus capable de décider par vous-même.
  • Vous pouvez autoriser votre mandataire à prendre également des mesures personnelles (p.ex. placement en maison de repos). Il doit aussi vous impliquer autant que possible dans l’exercice de sa mission.
  • Les mandats autres que les mandats de protection prennent fin lorsque le mandant est déclaré incapable. Si nécessaire, modifiez les statuts de votre société afin que le gérant puisse continuer à administrer les biens de la société lorsque l’un des associés sera déclaré incapable.
  • Un contrat de gestion patrimoniale discrétionnaire peut également prévoir que le mandat subsiste si le mandant est déclaré incapable, à condition que cela soit expressément stipulé.

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