ORDRE DES MÉDECINS - ASSOCIATIONS - 12.11.2020

Plus de droit d’entrée dans le cadre d’une collaboration ?

Le Conseil national de l’Ordre n’est plus d’accord, dans deux avis de juin et septembre 2020, de demander un droit d’entrée dans le cadre d’une collaboration. Un fichier de patients ne peut être vendu, dit-il. Quelles sont les conséquences de ces deux avis ?

Une interdiction ordinale

Un premier avis en juin. Juste avant l’été, le Conseil national a lancé une première bombe en disant que «toute forme de dichotomie, impliquant qu’un jeune médecin généraliste doive céder une partie de son salaire à un médecin généraliste plus expérimenté ou à sa société, sous la forme d’un «droit d’entrée» pour obtenir une part du fichier patients, est juridiquement et déontologiquement inacceptable» (avis a167016, 20.06.2020) .

Un deuxième en septembre. Le Conseil national a été plus loin dans ce «commentaire» de son premier avis, où il a développé ses arguments et étendu l’interdiction des seuls généralistes à tous les médecins (avis a167027, 19.09.2020) .

Ses arguments. Le paiement d’un droit d’entrée pour acquérir une part du fichier de patients est juridiquement et déontologiquement inacceptable, et cela du fait que le médecin n’est pas le propriétaire du dossier de ses patients, que cela peut être un obstacle au libre choix du médecin et que ce serait contraire à l’interdiction de partage des honoraires édictée par la loi du 10 mai 2015 relative à l’exercice des professions des soins de santé (art. 38) .

Quelles en sont les conséquences ?

Une portée peu claire. Même après le deuxième avis, on ne voit toujours pas clairement ce que vise le Conseil national. Une lecture stricte du texte n’interdirait qu’une demande de rétribution d’une partie du fichier de patients. Cela n’empêcherait pas le paiement d’un droit d’entrée pour une autre prestation, p.ex. un accompagnement et un soutien ou l’acquisition d’une partie du cabinet. Dans le cadre d’une association ou d’une société, un droit d’entrée reste d’ailleurs admis, dit le Conseil national littéralement, pour peu que le nouvel arrivant acquière une partie du cabinet.

Des arguments douteux. Même dans cette interprétation limitée, ces avis posent encore question. Ainsi, il est habituel (et admis par la jurisprudence) que des médecins qui constituent une société lui vendent leur clientèle ou leur goodwill. Il est exact qu’un médecin n’est pas le propriétaire des dossiers de ses patients, mais cela ne veut pas dire que ceux-ci sont pour lui sans valeur et qu’il ne peut pas les céder. En outre, ces avis peuvent entraver la liberté de contracter et d’entreprendre, qui vaut aussi pour les médecins. Enfin, le texte de l’art. 38 précité n’a guère été modifié par rapport à celui de l’AR n° 78, alors qu’on n’apercevait aucune interdiction dans ce dernier.

Pas d’impact sur le juridique. Les avis du Conseil national, et par extension le Code de déontologie, ne sont pas juridiquement contraignants. Dès lors, si un droit d’entrée a été prévu dans une convention qui ne répond pas aux conditions de ces avis, cette convention est et reste juridiquement contraignante. Ni vous-même, ni une autre partie à cette convention ne pouvez nier la clause sur le droit d’entrée en excipant de ces avis. Nous ne voyons pas non plus pourquoi la jurisprudence n’accepterait plus les droits d’entrée. Bien sûr, une sanction disciplinaire pourrait être prononcée, à l’occasion d’un conflit p.ex., mais là aussi, on peut se demander s’il ne sera pas possible de la contrer au moyen d’arguments juridiques...

Les arguments que le Conseil national invoque pour interdire les droits d’entrée sont critiquables. En outre, il n’est pas possible d’exciper du nouveau prescrit déontologique pour s’exonérer d’une convention déjà conclue. D’un point de vue purement juridique, il reste bel et bien possible de prévoir un droit d’entrée.

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