Quand le fisc peut-il rompre le secret bancaire ?
Contexte
PCC. Le PCC (point de contact central) est une banque de données de la Banque nationale de Belgique (BNB) reprenant tous vos comptes bancaires et certains contrats financiers (crédits hypothécaires et assurances-vie) belges et étrangers. Depuis le 1er janvier 2022, les banques communiquent aussi le solde des comptes au PCC au 30 juin et au 31 décembre.
Consultation par le fisc. Si une enquête fiscale révèle des indices de fraude fiscale, le fisc peut consulter le PCC et éventuellement lever le secret bancaire (art. 322, §3, al. 4, et §2, al. 2, CIR 92) . Il doit toutefois d’abord demander les renseignements au contribuable lui-même, en indiquant qu’il pourra rompre le secret bancaire en cas de refus.
Que s’est-il passé ?
Les faits. A, administrateur d’une SA, reçoit du fisc la notification d’une extension du délai d’investigation en raison d’indices de fraude fiscale, et une demande de renseignements au sujet de ses comptes bancaires. Dans cette demande, le fisc l’avertit que, s’il ne lui fournit pas les données demandées, il consultera le PCC et demandera les données aux banques elles-mêmes. A conteste les indices de fraude fiscale et refuse de fournir les informations demandées.
La contestation. Le fisc consulte le PCC pour obtenir un aperçu de tous les comptes financiers de A. Il lui envoie ensuite une nouvelle demande de renseignements, dans laquelle il lui annonce que, si A persiste dans son refus, il fera lever le secret bancaire et demandera les informations sur les comptes en question aux banques elles-mêmes.
Qu’en a dit la justice ?
La Cour d’appel d’Anvers (Anvers, 31.10.2023) a jugé l’enquête bancaire illicite. Le fisc ne peut consulter le PCC et lever le secret bancaire que s’il a des indices de fraude fiscale. Dans cette affaire, le contrôleur s’était basé sur des informations de l’ex-comptable de la SA, d’après lequel des bonus avaient été attribués aux salariés de la société sans retenue du précompte professionnel. Ces bonus avaient toutefois été comptabilisés comme des royalties, avec retenue du précompte mobilier. Le fisc détenait toutes les données financières à ce sujet au moment où il a demandé à consulter le PCC. En outre, vu que l’enquête ne portait pas sur les revenus de l’administrateur, mais sur ceux des salariés de la SA, les données que le fisc voulait demander aux banques n’étaient pas pertinentes pour déterminer les revenus imposables de ces salariés, mais bien ceux de A, qui n’étaient pas concernés par l’enquête.
Que devez-vous en retenir ?
Le fisc avait appliqué la bonne procédure pour rompre le secret bancaire, en envoyant d’abord la demande de renseignements à A, mais avait commis une erreur au point de départ de la procédure. Certes, les bonus en question avaient été mal déclarés, comme des revenus mobiliers et non des revenus professionnels, mais rien n’avait été caché au fisc. Ce dernier ne peut en outre rompre le secret bancaire que pour demander des données utiles ou pertinentes pour déterminer les revenus imposables du ou des contribuable(s) concerné(s) (ici, les salariés de la SA dont A était l’administrateur) et non, comme en l’espèce, ceux d’un autre contribuable (A lui-même).