LICENCIEMENT - MOTIF DE LICENCIEMENT - 22.03.2024

Un enregistrement pour prouver une attitude agressive ?

Un travailleur se montre agressif envers vous et personne ne se trouve à proximité pour pouvoir en attester. Peut-il être utile d’enregistrer la situation (audio et/ou vidéo) avec votre smartphone sans son consentement ? Un tel enregistrement constitue-t-il une preuve valable pour un licenciement ?

Que s’est-il passé ?

Un travailleur s’est montré agressif. L’intéressé était occupé en tant qu’assistant administratif. Il accompagnait régulièrement le directeur de l’entreprise lors de ses déplacements professionnels à l’étranger. Un beau jour, il a toutefois totalement perdu son sang-froid et est devenu extrêmement agressif en ramenant son employeur de Paris à Bruxelles. Il l’a injurié, menacé de porter plainte et de le frapper, tout en tapant du poing sur le volant, le tableau de bord et le siège passager.

Enregistré avec le smartphone. L’employeur a alors activé la fonction d’enregistrement de son smartphone pour conserver une trace de l’incident. Le travailleur a toutefois refusé d’arrêter le véhicule et de céder le volant à son employeur.

Licenciement pour motif grave. L’employeur a ensuite licencié le travailleur pour motif grave trois jours plus tard, en faisant référence à cet incident et à d’autres difficultés dans la relation de travail.

Le travailleur a contesté son licenciement. Il estimait en effet que son employeur avait violé sa vie privée en l’enregistrant sans son consentement.

Qu’a dit le juge ?

Licenciement pour motif grave accepté. La Cour du travail a estimé que le licenciement pour motif grave était régulier. Elle a en effet considéré que le travailleur avait commis une faute grave en injuriant son employeur et en le menaçant. Cette attitude avait rendu immédiatement et définitivement impossible toute poursuite de la relation professionnelle.

L’enregistrement a pu servir de preuve. La Cour du travail a par ailleurs estimé que l’employeur pouvait se servir de l’enregistrement de l’incident, car il avait agi dans le but de se défendre face à l’agression du travailleur. D’après le juge, la faute du travailleur pesait plus lourdement dans la balance que la violation de sa vie privée par son employeur.

Que pouvez-vous en retenir ?

Une preuve obtenue de façon illicite est parfois admise. Le juge peut accepter une preuve obtenue de manière illicite, à moins que l’irrégularité commise n’entache la fiabilité de la preuve ou ne mette en péril le droit à un procès équitable.

Appréciation souveraine du juge. Il doit tout d’abord apprécier la gravité de la faute alléguée. Cette dernière peut peser plus lourdement que le droit au respect de la vie privée. Il doit ensuite examiner la manière dont la preuve a été obtenue. En l’espèce, il se demandera si l’enregistrement n’a pas plutôt été réalisé en vue de provoquer une réaction du travailleur qu’il n’aurait sinon pas eue. Il cherchera aussi à savoir si un enregistrement était le seul moyen de prouver les faits allégués. Si tel est le cas, le juge pourrait accepter cette preuve.

Arrêt C. trav. Bruxelles, 13.10.2023, 2019/AB/214.Décision favorable à l’employeur.

Il appartient au juge de déterminer si une preuve obtenue illicitement, comme un enregistrement réalisé à l’insu de l’intéressé, peut être utilisé comme preuve. Il tiendra à cet égard compte des circonstances concrètes de la cause, de la manière dont la preuve a été obtenue, de la possibilité de prouver les faits autrement, de la gravité de la faute et du droit à un procès équitable.

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