DROIT MÉDICAL - EUTHANASIE - 09.11.2022

Deux arrêts en matière d’euthanasie le mois dernier…

En octobre 2022, les médias ont fait état de deux arrêts rendus sur la législation belge en matière d’euthanasie : un arrêt européen tout d’abord, puis un arrêt de la Cour constitutionnelle. Quelle en est la teneur ? Peut-on encore pratiquer une euthanasie ? À voir les titres dans la presse, on pourrait en douter…

Les conditions légales de l’euthanasie

Quant au fond. La loi met quatre conditions à une demande «actuelle» d’euthanasie : un patient qui (1) est capable d’exprimer sa volonté ; (2) a émis une demande d’euthanasie de manière volontaire, durable et répétée et (3) se trouve dans une situation médicale sans issue de souffrance physique ou psychique constante, insupportable et inapaisable. (4) Cette situation doit enfin résulter d’une affection grave et incurable causée par une maladie ou un accident.

Quant à la procédure. Là aussi, il y a des conditions à respecter. Ainsi, le patient doit transcrire sa demande, le médecin doit l’informer en détail (entre autres quant aux options palliatives) et il faut prendre l’avis d’un autre médecin, indépendant. Pour un patient non terminal, ce sont même deux médecins indépendants qui doivent donner leur avis (dont un qui soit psychiatre ou spécialiste de l’affection concernée), et il y a aussi un délai d’attente d’au moins un mois à respecter.

Quant au contrôle a posteriori. Une euthanasie, une fois exécutée, doit encore être déclarée à la Commission fédérale de contrôle et d’évaluation (CFCE). Celle-ci vérifie si les conditions légales ont été remplies. Si l’une ne l’a pas été, en ce inclus la déclaration à cette commission, le médecin exécutant pourrait se voir poursuivre pour empoisonnement.

En péril du fait de deux arrêts ?

Quant au verdict de la CEDH. La Cour européenne des droits de l’homme a «condamné» l’État belge, ont titré la plupart des journaux. Ces titres ne reflétaient cependant pas tout à fait la réalité, vu que la violation des droits de l’homme ne porte que sur une petite partie de la réglementation sur l’euthanasie, à savoir ce contrôle a posteriori de la CFCE. Aujourd’hui, elle peut intervenir dans des conditions qui n’offrent pas des garanties suffisantes (d’indépendance), car des personnes siégeant dans cette commission sont susceptibles de statuer sur leur propre dossier. Il faut donc s’attaquer à cet aspect, mais pour le reste, la législation belge sur l’euthanasie (avec toutes les conditions précitées) est bel et bien conforme aux droits de l’homme (CEDH, 04.10.2022) .

Quant au verdict de la CC. La Cour constitutionnelle a jugé la loi sur l’euthanasie trop stricte pour les médecins, ont dit les médias. Et c’est bel et bien la réalité ! En cause, la possibilité de sanctionner automatiquement le médecin exécutant qui violerait les conditions légales comme un grand criminel, à savoir pour un délit d’empoisonnement. La Cour constitutionnelle ne trouve pas une telle «qualification» toujours logique, non seulement quand les conditions de fond matérielles n’ont pas été respectées, mais aussi quand une «petite» condition formelle ne l’a pas été, comme une notification tardive à la CFCE. Sur ce plan, il y a assurément lieu d’adapter la loi sur l’euthanasie, mais cela n’implique pas que, entre-temps, jusqu’à ce que cela ait été fait, il ne serait plus possible d’accueillir des demandes d’euthanasie (répondant aux conditions actuelles). Cela reste possible, vu que cet arrêt n’a pas non plus critiqué ces conditions comme telles, lesquelles restent donc d’application (CC, 20.10.2022) .

Selon l’arrêt européen, le «contrôle a posteriori» de la CFCE pose problème, et selon la Cour constitutionnelle, une éventuelle violation des conditions ne peut pas toujours mener à des poursuites pour le délit d’empoisonnement. Aucun de ces arrêts n’empêche toutefois un médecin de décider d’accéder à une demande d’euthanasie qui répond aux conditions légales actuelles.

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