ÉTRANGER - 23.11.2021

Rapatrier de l’argent depuis l’étranger ?

Ces dernières années, il est devenu très difficile pour le Belge d’encore détenir des avoirs mobiliers à l’étranger. Les conditions de rapatriement sont aussi systématiquement renforcées. Récemment, la Banque nationale a de nouveau accru la pression sur l’investisseur en adoptant une position très stricte dans une circulaire. Qu’en est-il exactement ?

Avoirs étrangers. Il n’est toujours pas interdit de détenir des liquidités ou des placements à l’étranger. Il peut y avoir des raisons parfaitement légitimes à cela, p.ex. parce que des établissements financiers étrangers proposent un type de placement dont l’offre en Belgique est limitée ou parce que la détention des avoirs auprès d’un établissement étranger déterminé est motivée par les services et les conseils spécialisés qu’offre cet établissement.

Régularisation. Depuis 2004, la Belgique a instauré quatre procédures de régularisation fiscale et pénale successives, les «déclarations libératoires uniques». Alors qu’initialement, c’étaient principalement les revenus fiscalement non prescrits qui étaient régularisés, la DLUquater, qui court du 1er  août 2016 au 31 décembre 2022, prévoit une imposition forfaitaire de 40 % des capitaux prescrits dont l’origine licite ne peut pas être étayée par des preuves. Outre ces procédures de régularisation officielles, il a toujours aussi été possible de demander une régularisation spontanée.

Rôle des banques. Les établissements financiers établis en Belgique jouent un rôle essentiel dans la lutte contre le blanchiment d’argent, en particulier en acceptant ou non les rapatriements d’avoirs étrangers. Ils doivent contrôler minutieusement l’origine de ces avoirs en vertu de leur devoir de vigilance. Leur rôle a été renforcé par la loi du 18 septembre 2017, la «loi anti-blanchiment», qui a remplacé la loi du 11 janvier 1993. La Banque nationale de Belgique (BNB) exerce quant à elle un rôle de surveillance à l’égard des établissements financiers belges. Dans sa circulaire du 8 juin 2021 (2021/06/23), elle a précisé davantage les obligations incombant aux établissements financiers en vertu de la loi anti-blanchiment. La BNB y adopte clairement une attitude extrêmement stricte vis-à-vis de ce devoir de vigilance.

Approche concrète. Dans sa circulaire, la BNB ne vise pas uniquement les nouvelles acceptations d’avoirs étrangers. Les acceptations antérieures doivent aussi être réexaminées par les établissements financiers, mais plutôt de manière générale et sur la base d’échantillons (suffisants et crédibles). Pour chaque dossier d’acceptation, l’établissement financier doit se demander si une personne raisonnable serait convaincue de la licéité de l’origine des avoirs, celle-ci étant de préférence corroborée par des documents probants. La circulaire souligne encore davantage cette préférence pour les documents écrits en indiquant que les simples affirmations de clients sont très peu convaincantes. La circulaire précise encore que le fait que les avoirs proviennent d’une donation ou d’un héritage n’est pas suffisant pour ne pas procéder à une analyse. L’origine licite des fonds dans le chef du donateur ou du défunt doit également être prouvée à suffisance.

Obligation de déclaration. Si l’origine licite ne peut pas être étayée suffisamment et si les zones d’ombre dans le dossier ne peuvent pas être éclairées dans un délai raisonnable par des preuves supplémentaires, l’établissement financier doit effectuer une déclaration à la Cellule de traitement des informations financières (CTIF), qui peut à son tour informer le ministère public, lequel peut ouvrir une instruction et engager des poursuites. Dès qu’il y a une présomption de fraude, du fait que l’origine licite des avoirs ne peut pas être prouvée à suffisance, l’établissement financier doit donc déclarer le dossier. Il n’y a pas que les rapatriements effectifs qui sont visés, il y a également lieu de vérifier la licéité des tentatives de rapatriement de fonds annoncées, qui n’ont finalement pas lieu. Si cette licéité n’est pas prouvée, le rapatriement envisagé doit également être déclaré à la CTIF.

Circulaire. Dans la circulaire, la BNB accorde une attention particulière aux fonds, rapatriés ou non, qui ont déjà fait l’objet d’une régularisation, mais limitée uniquement aux revenus non prescrits fiscalement. Les fonds, rapatriés ou non, qui n’ont été régularisés que partiellement, à savoir uniquement pour le volet non prescrit fiscalement, peuvent à présent faire l’objet d’une déclaration à la CTIF. C’est particulièrement douloureux pour les contribuables qui ont opté pour une DLU ou une DLUbis. Ce n’est en effet que depuis la DLUter que la régularisation des capitaux prescrits a été expressément nommée par la loi. De la sorte, la circulaire accroît une nouvelle fois la pression sur les contribuables qui ont demandé de bonne foi, il y a des années, une régularisation du volet non prescrit et les pousse à présent à procéder à une régularisation complète. C’est possible, pour autant que vous n’ayez pas encore demandé de régularisation DLUquater et pour autant que des actes d’instruction n’aient pas encore été accomplis, par le ministère public p.ex. Dans sa circulaire, la BNB incite de facto les banques à mener une politique d’acceptation axée sur une régularisation complète.

Dans sa circulaire du 8 juin 2021, la Banque nationale adopte une attitude très stricte vis-à-vis des banques concernant leur devoir de vigilance à l’égard des rapatriements d’avoirs étrangers. La BNB a ainsi précisé qu’une présomption de fraude suffit déjà pour une déclaration obligatoire à la CTIF. Au cours des prochains mois, les banques devront aussi effectuer un audit complet de leur politique d’acceptation et des décisions prises par le passé en matière d’acceptation d’avoirs étrangers. Cet audit pourrait donner lieu à de nombreuses déclarations complémentaires à la CTIF. Par cette circulaire, la BNB met la pression sur les contribuables pour qu’ils procèdent à une régularisation complète DLUquater, même s’ils ont déjà effectué jadis une régularisation des revenus non prescrits.

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