DROIT - 19.10.2023

Mettre fin à un contrat d’entreprise ?

Pouvez-vous mettre fin du jour au lendemain au contrat que vous avez signé avec un entrepreneur ? Que dit la loi ? L’entrepreneur peut-il convenir d’autres arrangements avec vous ? À quelle indemnité a-t-il droit ? Peut-il convenir avec vous d’une indemnité forfaitaire ? Quelles sont les restrictions légales en la matière ?

Mettre fin au contrat. En tant que maître d’ouvrage, vous pouvez dans certains cas (faire) résilier le contrat d’entreprise lorsque l’entrepreneur ne respecte pas ses obligations contractuelles ou commet des fautes. Mais même si vous n’avez rien à reprocher à l’entrepreneur, vous pouvez toujours mettre unilatéralement fin au contrat d’entreprise, tant avant le début des travaux que pendant l’exécution de ceux-ci. La loi dit en effet que le maître d’ouvrage peut résilier, par sa seule volonté, le marché à forfait, quoique l’ouvrage soit déjà commencé, en dédommageant l’entrepreneur de toutes ses dépenses, de tous ses travaux, et de tout ce qu’il aurait pu gagner dans cette entreprise (art. 1794 ancien C. civ.) . Vous ne devez en outre pas motiver cette résiliation. Sachez toutefois que la réglementation qui figure dans la loi relève du droit supplétif. L’entrepreneur peut donc limiter ou exclure contractuellement cette possibilité de résiliation.

Indemnité. Si vous recourez à cette possibilité de résiliation, vous devrez toutefois indemniser l’entrepreneur. Celui-ci peut tout d’abord vous demander une indemnité pour les travaux qu’il a déjà effectués sur le chantier. Il peut aussi vous demander le remboursement des travaux préparatoires éventuels, des matériaux qu’il a déjà commandés pour votre chantier, etc. Il peut en outre aussi vous demander une indemnité compensant le bénéfice qu’il aurait pu réaliser sur le chantier. En cas de discussion, c’est à l’entrepreneur de prouver le montant des indemnités demandées. En pratique, cela ne sera pas toujours simple. En tant que maître d’ouvrage, vous avez dès lors intérêt à ne pas accepter sans broncher l’indemnité réclamée par l’entrepreneur.

Un forfait ? Les entrepreneurs prévoient souvent dans leur contrat d’entreprise ou leurs conditions générales une indemnité forfaitaire en cas d’annulation du contrat par le client. Il s’agira souvent d’un pourcentage du prix convenu. L’entrepreneur devra toutefois prouver que cette indemnité a effectivement été convenue. Le juge se montrera très strict sur ce point si vous contractez avec un entrepreneur en tant que particulier. La Cour de cassation a ainsi déjà considéré qu’il ne suffisait pas qu’un entrepreneur insère dans ses conditions générales figurant au verso d’un bon de commande une clause prévoyant une indemnité de 30 % en cas d’annulation. Selon la Cour, une telle clause si élevée doit figurer au recto pour pouvoir être considérée comme acceptée (Cass., 18.06.2021) .

Restrictions légales. La clause qui prévoit une indemnité forfaitaire doit répondre à des conditions strictes selon la loi. Les clauses fixant des montants de dommages et intérêts réclamés en cas d’inexécution ou de retard dans l’exécution des obligations du consommateur qui dépassent manifestement l’étendue du préjudice susceptible d’être subi par l’entreprise ne sont pas autorisées (art. VI.83 CDE) . Une telle clause doit en outre être réciproque et prévoir une indemnité équivalente en votre faveur au cas où l’entrepreneur ne respecterait pas ses propres obligations. Dans le cas contraire, la clause sera abusive et l’entrepreneur ne pourra pas l’invoquer. Il devra alors pouvoir prouver toutes ses dépenses, son travail et tout ce qu’il aurait pu gagner dans le cadre de cette entreprise. Si la clause est quand même valable, vous pourriez encore essayer de soutenir qu’une réduction s’impose. La loi dit en effet que si la clause indemnitaire est manifestement déraisonnable, le juge peut la réduire, compte tenu du dommage et de toutes les autres circonstances, en particulier des intérêts légitimes du créancier (art. 5.88, §2, C. civ.) .

B2B ? Si vous êtes un entrepreneur et que vous concluez un contrat d’entreprise dans le cadre de votre activité, une clause qui dépasse manifestement l’étendue du préjudice susceptible d’être subi par l’entrepreneur est réputée abusive. L’entrepreneur peut toutefois réfuter cette présomption en pointant p.ex. d’autres dispositions du contrat qui vous sont très favorables. La clause ne doit pas non plus être réciproque. Si la clause est abusive, l’entrepreneur pourra uniquement demander une indemnité s’il est en mesure de prouver le préjudice et les autres éléments qu’il invoque.

Annulation partielle ? Si en cours d’exécution du contrat d’entreprise, vous souhaitez exclure certains travaux prévus dans celui-ci (parce que vous ne voulez plus faire réaliser ces travaux ou voulez les confier à un autre entrepreneur), les règles sont les mêmes. Si vous ne parvenez pas à un accord avec l’entrepreneur, vous risquez aussi de devoir payer des dommages et intérêts.

Comment procéder ? Si vous voulez annuler un contrat d’entreprise, vérifiez tout d’abord si les modalités contractuelles fixées avec vous sont bien valables. Négociez ensuite une résiliation en essayant de payer une indemnité aussi faible que possible et mettez cet accord sur papier.

En tant que maître d’ouvrage, vous pouvez toujours mettre unilatéralement fin à un contrat d’entreprise. L’entrepreneur pourra alors toutefois vous demander une indemnité pour les dépenses déjà consenties, le travail déjà effectué et le bénéfice qu’il aurait pu retirer de cette entreprise. Cette indemnité peut être fixée de manière forfaitaire dans le contrat ou les conditions générales de l’entrepreneur. L’indemnité forfaitaire ne peut toutefois pas être exagérée. Si vous concluez le contrat en tant que particulier, une telle clause doit en outre être réciproque. Les règles sont les mêmes en cas d’annulation partielle du contrat d’entreprise.

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