DROITS ET OBLIGATIONS - 20.10.2008

Êtes-vous toujours le patron… ou est-ce le juge ?

Vous voulez confier une autre fonction à un travailleur ou le transférer dans un autre service ou siège, c’est-à-dire modifier une condition essentielle de travail. Le juge peut-il annuler votre décision ? Visiblement, oui…

Bref rappel

Si vous modifiez de manière unilatérale et sub­stantielle une condition essentielle de travail, vous commettez en fait une forme de rupture de con­trat. Le travailleur pourra alors demander la ­résolution judiciaire de son contrat, et vous ­réclamer des dommages et intérêts (correspondant généralement au montant de l’indemnité de préavis).

Que s’est-il passé ?

Un employeur souhaitait qu’un travailleur ne travaille plus en Afrique, mais en Belgique dans une fonction plus ou moins similaire. Le poste en Belgique ne se libérant que trois mois plus tard, l’employeur décida de dispenser le travailleur de prestations pendant ces trois mois (son remplaçant en Afrique était déjà entré en fonction). Le travailleur n’était pas d’accord avec cette décision unilatérale et intenta une action au fond en résolution judiciaire de son contrat. Dans l’attente de la décision, il introduisit aussi une action en référé pour pouvoir continuer à travailler.

Qu’a dit le juge ?

Le juge des référés a donné raison au travailleur. Dans l’attente de la décision au fond, l’employeur a dû permettre à l’intéressé de continuer à travailler dans les mêmes conditions et la même fonction qu’auparavant. Pour pouvoir prendre une telle décision, la “condition d’extrême urgence” doit être remplie, ce qui, selon le juge, était le cas en l’espèce, étant donné qu’un employeur ne peut pas décider à sa guise, du jour au lendemain, de ne plus donner de travail.

Que devez-vous en retenir ?

Il ressort de cette décision que les travailleurs disposent d’un moyen supplémentaire pour réagir contre une éventuelle modification d’une condition de travail. Ce faisant, ils peuvent faire annuler, ne serait-ce que temporairement, la modification que vous avez effectuée. En fait, cela va quand même très loin, puisque le juge estime pouvoir dire comment vous devez gérer votre entreprise…

Attention ! Il ne s’agit pas d’une décision isolée. D’autres décisions allant dans le même sens ont déjà été rendues à Bruxelles et à Charleroi. Mais cela ne signifie pas pour autant que celles-ci doivent être considérées comme la nouvelle “norme”. En définitive, le travailleur doit disposer d’arguments suffisamment solides pour démontrer cette urgence…

Conseil 1. L’idéal reste bien sûr de modifier les conditions de travail en concertation avec le travailleur (lisez : de lui faire signer les modifications). Si le climat s’est cependant dégradé au point que ce n’est plus possible, vous n’aurez souvent guère d’autre solution que d’agir unilatéralement.

Conseil 2. Vu le risque d’une action en référé, vous pouvez vous demander si, dans certains cas, il ne vaudrait pas mieux opter directement pour la solution radicale (le licenciement). Si vous ne licenciez qu’après une décision en référé négative (ce qui reste en principe possible), ce licenciement risque en effet de vous coûter encore plus cher (p.ex. aussi une indemnité pour abus de droit).

Si vous modifiez une condition de travail, le travailleur pourrait demander la résolution du contrat. De plus en plus de juges en référé ont cependant tendance à annuler dans l’intervalle la modification. Mieux vaut donc parfois envisager un licenciement immédiat.

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