CONTRATS - 04.09.2023

La résolution d’un contrat dans le nouveau Code civil

Dans le Livre 5, le nouveau Code civil codifie et modernise le droit des obligations, en combinant les «anciennes» dispositions encore pertinentes avec quelques acquis de la jurisprudence. Quelles sont les dispositions du Livre 5 concernant la résolution d’un contrat ? Quelles sont les conditions de la résolution ? Quelle est la différence entre la résolution et l’annulation d’un contrat ? Et à quels contrats ces nouvelles règles s’appliquent-elles ?

De quoi s’agit-il ?

La résolution d’un contrat est un moyen de mettre fin au contrat pour manquement fautif (inexécution) par l’une des parties contractantes. La résolution peut être judiciaire ou extrajudiciaire.

Conditions d’une résolution

Pour pouvoir résoudre un contrat, il faut en substance que trois conditions soient remplies. Tout d’abord, le contrat doit être synallagmatique, ce qui veut dire que toutes les parties ont des obligations. Ensuite, le manquement d’une partie doit être suffisamment grave (art. 5.90, al. 1er, C. civ.) . Pensez au non-paiement du loyer, à l’impossibilité de livrer un bâtiment à temps (si un délai explicite a été convenu), à la livraison de biens défectueux, etc. Enfin, la partie qui souhaite (faire) résoudre le contrat doit mettre en demeure l’autre partie.

Résolution judiciaire

La résolution judiciaire est prononcée par le juge, à la demande de la partie qui souhaite voir la résolution du contrat. Vous pouvez demander la résolution judiciaire par citation, par requête ou, si une procédure judiciaire est déjà en cours, par conclusion.

Le juge évalue si toutes les conditions sont remplies. Le plus souvent, la discussion porte sur la question de savoir si le manquement d’une partie est suffisamment grave pour procéder à la résolution. Le juge peut également assortir la résolution de dommages et intérêts complémentaires, ou imposer un délai à la partie défaillante pour lui donner la possibilité de remplir quand même ses obligations (art. 5.91 C. civ.) . Le juge peut également prononcer la résolution aux torts réciproques, si chacune des parties s’est rendue responsable d’une inexécution justifiant la résolution.

Il est préférable d’opter pour la résolution judiciaire si vous n’êtes pas certain de la gravité du manquement. Notez bien que, comme pour toute procédure judiciaire, cela peut prendre beaucoup de temps avant d’obtenir une réponse définitive.

Résolution extrajudiciaire

En vertu du nouveau Code civil (mais aussi, auparavant, selon la jurisprudence constante), vous pouvez également déclarer un contrat comme résolu de manière extrajudiciaire, c.-à-d. sans l’intervention d’un juge. Outre les trois conditions précitées (contrat synallagmatique, manquement suffisamment grave et mise en demeure), en cas de résolution extrajudiciaire, vous devez notifier à votre cocontractant la décision de résolution. Vous devez également prendre des mesures utiles pour établir l’inexécution (de l’autre partie).

Dans le cas de travaux de construction, il est préférable d’inviter l’autre partie à une constatation contradictoire de l’état des travaux. Si l’autre partie ne se présente pas, assurez-vous que le statut des travaux soit constaté unilatéralement (p.ex. par l’intermédiaire d’un huissier ou d’un architecte, avec des photos et un rapport).

Retenez bien qu’une telle résolution extrajudiciaire se fait toujours à vos risques et périls. S’il s’avère par la suite que vous avez résolu à tort le contrat extrajudiciairement, vous risquez d’être désigné comme la partie «coupable», et le contrat peut être résolu à vos frais, éventuellement avec des dommages et intérêts. Constituez donc un dossier dans lequel vous incluez de préférence plusieurs mises en demeure avec, dans la dernière d’entre elles, la mention que vous vous réservez le droit, une fois le délai écoulé sans qu’il ait été remédié au manquement, de déclarer le contrat résolu (de manière extrajudiciaire).

Clause résolutoire expresse

Il est possible d’inclure une clause résolutoire expresse dans votre contrat. Une telle clause accorde à une partie le droit de résoudre le contrat, aux conditions et modalités décrites dans la clause, sans intervention préalable du juge, si l’autre partie manque à l’une de ses obligations.

Les parties peuvent p.ex. reprendre dans leur contrat que le manquement à telle ou telle obligation justifie la résolution. Autrement dit, elles peuvent établir une liste d’obligations auxquelles elles qualifient le manquement de «grave».

Ici aussi, la partie qui souhaite la résolution du contrat doit mettre en œuvre la clause par notification écrite à l’autre partie, dans laquelle elle communique à cette dernière les manquements qui lui sont reprochés (art. 5.92 C. civ.) . La clause résolutoire expresse règle contractuellement, pour ainsi dire, la résolution extrajudiciaire. La rédaction d’une telle clause exige de tenir compte de la situation spécifique des parties et de leur contrat.

Résolution partielle

Si le manquement justifiant la résolution n’affecte qu’une partie du contrat, la résolution se limite à cette partie, pour autant que le contrat soit divisible dans l’intention des parties, eu égard à sa nature et sa portée (art. 5.96 C. civ.) . La résolution partielle est relativement nouvelle et est susceptible de donner lieu à une jurisprudence abondante. En effet, l’obligation d’une partie est souvent indissociable de l’obligation de l’autre.

Différence avec l’annulation d’un contrat

Alors que la résolution est une sanction pour un manquement dans l’exécution du contrat, l’annulation est une sanction pour un vice lors de la formation du contrat. Un défaut dans le consentement d’une partie, la capacité d’une partie ou un objet et une cause indéterminables ou non autorisés au moment de la conclusion du contrat peuvent donner lieu à l’annulation du contrat.

Alors que, dans le passé, l’annulation exigeait toujours une décision de justice, c’est l’article 5.59 du Code civil qui s’applique désormais : il reconnaît la nullité extrajudiciaire sur notification, par analogie avec la résolution extrajudiciaire.

Entrée en vigueur

Le Livre 5 du nouveau Code civil est entré en vigueur le 1er  janvier 2023 (art. 64 L. 28.04.2022) . Les nouvelles règles s’appliquent à tous les actes juridiques (y compris les contrats) et faits juridiques survenus après cette date.

Toutefois, l’ancien Code civil s’applique aux effets futurs des actes juridiques et faits juridiques survenus avant le 1er  janvier 2023, et aux actes juridiques et aux faits juridiques survenus après le 1er  janvier 2023 et se rapportant à une obligation née d’un acte juridique ou d’un fait juridique survenu avant cette date. Pensez à la résolution d’un contrat qui prend effet après le 1er  janvier 2023 pour un manquement commis avant cette date : dans ce cas, c’est encore l’ancien Code civil qui s’applique.

Pour compliquer davantage les choses, il est également possible pour les parties de déroger à ces règles de droit transitoire, et donc de s’entendre différemment…

CONSEILS

  • La résolution d’un contrat, tant judiciaire qu’extrajudiciaire, requiert un manquement suffisamment grave. Pour plus de sécurité, mettez toujours votre cocontractant en demeure une dernière fois, avec un délai ultime.
  • Vous pouvez également inclure dans votre contrat une clause résolutoire expresse. Celle-ci module contractuellement la résolution extrajudiciaire et détermine les manquements qui peuvent mettre en œuvre cette clause, les conditions, les délais (de sursis) qui peuvent s’appliquer, la manière de faire la notification, etc.
  • Le nouveau Code civil prévoit aussi la possibilité d’une résolution partielle.
  • Les nouvelles règles s’appliquent aux contrats conclus à partir du 1er  janvier 2023. Les contrats conclus avant cette date (y compris les avenants convenus après cette date) continueront à être régis par l’ancien Code civil, à moins que les parties ne conviennent d’appliquer les dispositions du nouveau Livre 5.

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